ETUDE SUR LES AGENTS SPORTIFS DANS L'UNION ... - KEA
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<strong>KEA</strong> – CDES – EOSE : Etude sur les agents sportifs dans l’Union européenne<br />
Les quelques rapports d’experts réalisés et investigations qui ont été menées sur les pratiques relevant<br />
de la criminalité financière et qui sont susceptibles de découler de l’activité d’agent sportif sont<br />
unanimes sur un point : il est très difficile d’apporter la preuve concrète de leur existence. Cette difficulté<br />
s’explique non seulement par la multiplicité des acteurs et intermédiaires impliqués dans ces activités<br />
criminelles, par la nature internationale de ces dernières (qui échappent le plus souvent au contrôle des<br />
autorités étatiques ou sportives nationales), ainsi que par le caractère immatériel de l’objet des<br />
transactions (la valeur / le talent des sportifs professionnels) qui facilite par exemple les surévaluations<br />
de leur valeur marchande.<br />
Plusieurs raisons peuvent néanmoins expliquer le fait que le rôle les agents sportifs soit discuté<br />
lorsqu’on en vient à examiner les problèmes de criminalité financière dans le sport professionnel en<br />
général, et dans le football en particulier.<br />
Il y a tout d’abord le rôle prépondérant des agents sportifs dans le cadre des transferts internationaux.<br />
Les agents sont en effet devenus, pour la plupart des sportifs professionnels, des acteurs<br />
incontournables leur permettant d’utiliser au mieux les possibilités qui leur sont offertes par le marché.<br />
L’explosion des montants des droits de retransmission d’évènements sportifs associée à la libéralisation<br />
du marché des sportifs professionnels en Europe, favorisée notamment par l’arrêt « Bosman » 156<br />
prononcé par la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE) en 1995, ont, en effet,<br />
provoqué une explosion du montant des salaires et des transferts des sportifs professionnels, et surtout<br />
des footballeurs 157 . Suite à cet arrêt, le rôle des agents sportifs s’est fortement développé dans la<br />
mesure où les transferts ont été facilités par le fait que tous les joueurs en fin de contrat étaient libres de<br />
s’engager avec un autre club sans que le versement d’une compensation financière soit de mise. Ainsi,<br />
selon un ancien responsable du Département du Statut des joueurs de la FIFA, la direction des flux<br />
d’argent dans le football professionnel a passablement changé à la suite de l’arrêt Bosman : « Au lieu<br />
de passer d’un club à un autre, l’argent a fini par atterrir dans les poches des joueurs et de leurs agents<br />
de manière beaucoup plus consistante que par le passé » 158 .<br />
C’est donc d’abord dans le cadre des transferts de sportifs que les flux financiers se sont accrus dans le<br />
sport professionnel 159 . Le cas du football illustre ce phénomène en raison des sommes qui y sont<br />
engagées. Le montant du récent transfert du joueur portugais Cristiano Ronaldo, transféré de<br />
Manchester United au Real Madrid pour un peu plus de 93 millions d'euros, est significatif du<br />
développement de ce qu’on appelle le « sport business ». Le fait que le marché potentiellement très<br />
juteux des transferts de sportifs de haut niveau intervient souvent dans un contexte d’opacité qui<br />
favorise l’émergence de dérives multiples, a d’ailleurs été reconnu par différentes instances du<br />
française sur les conditions de transfert des joueurs professionnels de football et le rôle des agents sportifs (souvent appelé<br />
« Rapport Juillot » du nom du rapporteur).<br />
156 Cet arrêt trouve sa source dans le litige opposant le footballeur belge Jean-Marc Bosman à son club du FC Liège, qui<br />
refusait de le transférer vers le club français de Dunkerque. Le joueur a porté l'affaire devant la CJCE en contestant la<br />
conformité des règles régissant les transferts au regard du droit communautaire, notamment la possibilité pour un club de<br />
réclamer une indemnité de transfert pour un joueur en fin de contrat, ainsi que l’existence de quotas limitant à 3 le nombre<br />
de joueurs étrangers ressortissants de l'Union européenne dans une équipe de club. La CJCE donna raison à Bosman,<br />
considérant que les règlements de l’UEFA étaient contraires au droit européen.<br />
157 De 1997 à 2007, les salaires des footballeurs professionnels ont progressé de 235% dans les cinq grandes ligues<br />
européennes (Angleterre, Espagne, Italie, Allemagne et France) pour atteindre une moyenne d'environ 60 % du chiffre<br />
d'affaires des clubs (« L'arrêt Bosman, détonateur de l'explosion des salaires », LesEchos.fr, 11 mai 2009).<br />
158 Cité dans Poli R., « Transferts de footballeurs : la dérive de la marchandisation », Finance & Bien Commun, n°26, hiver<br />
2006-2007, p. 40.<br />
159 Il est évident qu’avec la professionnalisation du sport, le développement des montants engagés pour l’appropriation des<br />
droits télévisuels et la commercialisation croissante du sport professionnel, les flux financiers se sont encore accrus.<br />
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