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SÉBASTIEN MARRE<br />
exploiter ensuite, en adoptant conjointement l’approche longitudinale et l’approche<br />
biographique qui consistent à suivre les individus dans le temps et dans l’espace<br />
tout en s’intéressant à leur entourage familial. Cela permet ainsi de retrouver les Piréotes<br />
en diaspora et leur famille, afin d’étudier leur parcours migratoire et leur carrière<br />
professionnelle. Il s’agit de réaliser une étude sur la diaspora grecque à partir<br />
du Pirée dans la seconde moitié du XIX e siècle, en explorant en particulier l’histoire<br />
des mobilités, celle de la famille nucléaire et celle de la parenté. Le lieu d’origine ‒ le<br />
Pirée ‒, un port grec de la Méditerranée orientale, créé ex nihilo dans les années<br />
1830, a été choisi pour la richesse des archives conservées et la présence de deux<br />
sources (le dimotologion et les listes électorales) qui permettent de retrouver des Piréotes<br />
installés à l’étranger. Puisque la famille est une institution qui revêt un caractère<br />
primordial dans le cas de la diaspora grecque, la reconstitution des liens de parenté<br />
à partir des dimotologia, une source établie selon une base familiale, semble tout<br />
à fait pertinente. Ainsi, dans le dimotologion et dans les listes électorales, on trouve<br />
des individus qui habitent ailleurs qu’au Pirée, d’où la possibilité de mettre en évidence<br />
des réseaux, ce que ne permettent pas les sources «traditionnelles» que sont<br />
les recensements de la population ou même l’état civil.<br />
L’objectif de cette micro-analyse est d’expliquer les trajectoires individuelles des<br />
électeurs du Pirée qui résident à l’étranger, tout en essayant de déterminer<br />
l’ensemble du réseau migratoire unissant le port du Pirée et d’autres lieux importants<br />
de la diaspora grecque de cette époque comme Marseille, Londres, Alexandrie<br />
ou Odessa. L’approche longitudinale et l’approche biographique (event history analysis<br />
en anglais) sont deux techniques complémentaires, perfectionnées depuis une dizaine<br />
d’années en France, en Grande-Bretagne, aux États-Unis ou au Japon, qui<br />
peuvent peut-être remplacer la technique française de reconstitution des familles, laquelle<br />
ne semble pas pouvoir être mise en œuvre à partir des sources grecques du<br />
XIX e siècle, étant donné l’importance des mobilités spatiales 10 . L’approche longitudinale<br />
permet de suivre les individus et les groupes familiaux auxquels ils appartiennent<br />
sur une période donnée, afin de mettre en évidence le cycle de vie du<br />
groupe familial et les évolutions du statut socioprofessionnel des individus ou leurs<br />
lieux de résidence successifs. Dans une étude longitudinale, on reconstitue des trajectoires<br />
individuelles 11 . L’approche biographique, elle, est un outil qui permet de<br />
comprendre les processus qui sont à l’œuvre dans le déroulement de la vie des individus.<br />
Cette approche a pour principal intérêt de tenter d’étudier les interactions<br />
entre les phénomènes démographiques et sociaux. Elle vise à redonner une place<br />
centrale à l’individu. Le chercheur qui adopte une telle approche a pour ambition<br />
de montrer que l’existence des individus n’est pas déterminée à l’avance, mais qu’à<br />
10 Sur les méthodes et les techniques d’analyses récentes en démographie historique, cf.<br />
Graziella Caselli, Jacques Vallin et Guillaume Wunsch (dir.), Démographie : analyse et synthèse.<br />
Observation, méthodes auxiliaires, enseignement et recherche, vol. VIII, Paris, 2006, pp. 201-241.<br />
11 Sur l’observation démographique longitudinale, cf. Graziella Caselli, Jacques Vallin et<br />
Guillaume Wunsch (dir.), Démographie : analyse et synthèse. La dynamique des populations, vol. I,<br />
Paris, 2001, pp. 149-163.<br />
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