DIGITHÈQUE - Université Libre de Bruxelles

LE PROBLÈME DE LA COMMANDE DE L'ENTREPRISE 259
tale foisonne en effet de solutions adaptatives et mutuellement
équilibrées. L'idéaliste n'admet guère volontiers de prendre
pour lui cette leçon : le concept de « coexistence pacifique»,
remplaçant peut-être celui de tolérance, est prononcé du bout
des lèvres.
Sur le plan des valeurs, ces attitudes vont souvent de pair
avec l'option pluraliste face à la moniste. Pour le tenant de
cette dernière (en général de caractère plus autoritaire que
celui de la première!) un modèle préférentiel est non seulement
à prescrire urbi et orbi, mais encore à appliquer intégralement
à une situation donnée. Pour le premier, plusieurs
valeurs, même difficilement compatibles, peuvent néanmoins
être poursuivies de concert. L'idéaliste, ayant par exemple opté
pour le modèle juridique de la distribution des pouvoirs dans
l'entreprise par délégation en cascade, voudra l'appliquer jusqu'au
dernier exécutant - en tenant par exemple à lui définir
sa zone de responsabilité, son autorité, ses obligations.
L'empiriste, bien que recherchant également, comme tout
être humain, l'économie maximale de pensée, tentera de modeler
la réalité d'une façon cohérente, mais sa recherche d'efficacité
d'action subséquente sera son objectif majeur, et il
admettra que l'organisation d'une société d 'hommes comme
l'entreprise peut se développer et fonctionner d'une façon adéquate,
efficace, de plusieurs façons différentes - en prenant
exemple sur la réalité biologique, aux inventions organisationnelles
multiples. L'idéaliste donc n'aime guère ce qu'il appelle
des compromis. Bien sûr, il n'est pas irréaliste, et dans l'entreprise
bien plus encore qu'en politique, l'idéaliste tient relativement
compte des réalités. Néanmoins, c'est bien souvent à
contrecœur; et s'il était vraiment maître chez lui, s'il pouvait
manier les hommes comme il le voudrait, il imposerait une
structure de commande plus homogène, plus cohérente, plus
esthétique, une et unique, fondée d'après lui et donc seule
juste, valable, rationnelle et, prétend-il, efficace ipso facto. Son
sacrifice aux pressions humaines le mène alors à des solutions
hybrides dont nous examinerons plus loin quelques caractéristiques.
En bref, dans l'entreprise, se retrouvent ces deux courants
: l'un, de nécessité, issu d'une éthique à base laïque,
religieuse ou politiqlle; l'autre, de pragmatisme, d'adaptation,