DIGITHÈQUE - Université Libre de Bruxelles

292 « ALBUMS n'IDÉES)) (1934)
2° une idée donnée descriptivement, sans valeur à l'état d'égalité de
substitution, lui donner valeur et puissanoe de débordement.
(p. 219)
Citons encore, ne fût-ce que pour la beauté de l'expression,
la conclusion d'un passage important:
Et tout ce que tu inventes, tu l'inventes au large de ce que tu es.
(p. 155)
Mais il faut revenir à l'expérience de celui qui, à travers
le penseur, reste un poète conscient de ses pouvoirs, un écrivain
conscient de ses moyens. Elle lui dicte, cette expérience conduite
comme une expérience de laboratoire, une série de
réflexions sur l'imagination en fonction desquelles on pourrait
suivre le cheminement des images par exemple dans La Jeune
Parque:
Ce n'est pas la même chose que (( d'avoir de l'imagination» et
(( d'avoir des images)J. En général, les poètes ont plus d'images
qu'ils n'ont d'imagination.
j'entends par imagination l'exploitation des images - l'opération
sur image - l'exploration du champ ou univers d'une image.
Comme la logique explore l'implication de concepts -
l'image et sa possibilité et non sa transitivité
C'est considérer l'image comme une valeur d'un système à variations.
(p. 212)
Quant à l'ironie sous-jacente ou visible pour tout ce qui
regarde le style, elle est un correctif à cette expérience même,
l'empêchant de se prendre, comme les autres, trop au sérieux,
dans ce qu'il appelle le fonctionnement verbal:
Le mot infini ne coûte pas plus à écrire que le mot chambre, le
mot Océan plus que cuvette. L'indépendance du signe et de la chose
signifiée permet de jouer, comme avec des géants en baudruche,
avec les mots géants. (p. 214)
Un curieux paragraphe est précédé du mot L'Ange et l'on
sait que l'ange, dans le langage valéryen est ce qu'il regarde
comme l'essence spécifique de l'homme, comme sa spiritualité
la plus haute et que, dans son désintéressement absolu des
contingences, il se sent être peut-être plus qu'un autre:
Le mouvement de dégoût est aussi dégoûtant aux yeux de l'ange
que la chose qui le provoque; et le flux de la colère ou de la haine
lui paraît plus révoltant que toute cause de colère,
car, dans les deux cas, il y a perte de la liberté et obéissance à la
circonstance, à laquelle on sacrifie sa force et non pas à ce que l'on
veut de plus haut. (p. 221)