DIGITHÈQUE - Université Libre de Bruxelles

LE PROBLÈME DE LA COMMANDE DE L'El\TREPRISE 271
autrement complexes et d'une autre essence que de la terre à
pétrir, il faut admettre aussi que les approches juridique et
morale, si nécessaires qu'elles soient, doivent se compléter
d'une approche scientifique [19J. Pour des raisons historiques,
de formation personnelle ou de préférence tempéramentale,
ou encore pour des raisons d'urgence, le dirigeant est souvent
poussé à choisir d'entrée de jeu la démarche normative pour
organiser la distribution des pouvoirs dans son secteur. S'il
s'agit d'un secteur neuf, au moment de la fondation de celui-ci,
la démarche normative la plus courante consiste à penser le
système futur en termes de responsabilités et d'autorité, de fins
et de moyens. Dès lors, le dirigeant se fixe une tâche primaire,
un objectif premier et il distribue les objectifs et les moyens
(humains, matériels et financiers) en cascade. Mais lorsque
cette tâche est accomplie et que le système a été mis en action,
ce dernier se met à vivre: les choses se compliquent, le système
s'adapte à son milieu, que n'avait pas pu définir rigoureusement,
et pour cause, le planificateur. Ainsi, par exemple, si le
dirigeant a bâti une organisation en staff & Zine, la tâche de
ces staffs n'est évidemment pas de pur conseil et avis, et leur
imbrication dans le processus de l'entreprise exige qu'ils interviennent
de façon active, prennent leurs responsabilités et les
décisions adéquates.
Si le chef d'entreprise se cantonne alors - suivi souvent
en cela par sa chaîne hiérarchique - dans une conception
étroitement juridique, il aura contre lui son personnel de staff,
coincé entre les exigences de ses tâches et la nullité légale de
son autorité.
Lorsqu'il s'agit de réorganiser le pouvoir dans un système
en vie depuis longtemps, les choses sont plus compliquées
encore: même si le planificateur parvient à réallouer objectifs
et moyens, souvent après une période de reprise en main autoritaire,
centralisatrice, les choses se remettront à vivre par
après (les gens menacés rentrent dans leur coquille pendant
l'orage, puis en sortent bien vite au premier signe d'éclaircie!)
et le modèle sera à nouveau une vue fictive, illusoire et, partant,
peu utile de cette réalité que le dirigeant s'efforce de
contrôler, de commander.
De plus, même s'il élabore une machine parfaite en termes
de fins et de moyens, il faudra que le planificateur puisse