DIGITHÈQUE - Université Libre de Bruxelles

364 ANDRÉ POUSSET
Commande générale et commandement des hommes
A ce propos, la distinction entre commande générale de
l'entreprise et commandement des hommes est utile. Elle rappelle
d'ailleurs - sans tout à fait la recouper - celle faite
depuis longtemps à l'armée entre l'échelon de conception (rôle
des officiers supérieurs et d'état-major) et l'échelon d'exécution
(rôle des officiers subalternes et des sous-officiers). La commande
générale a souvent postulé que le groupe humain en
bout de chaîne n'était qu'un instrument passif [19J et que,
même s'il fallait les traiter plus « humainement », c'était aux
supérieurs immédiats de ces agents à se comporter en bons
meneurs d'homme. De là l'importance donnée ces dernières
décennies aux qualités de leadership à développer chez les
contremaîtres dont c'est bien souvent le sort de résoudre la quadrature
du cercle, et de rendre possible l'impossible [21 J .
Une conception et une technologie cybernétiques de la
commande évitera cependant bien des instructions « impossibles
», de par le soin donné aux régulations générales, globales,
qui, si grossières soient-elles, empêcheront déjà les échelons
subalternes, les sous-systèmes humains, de s'écarter de
leur zone d'équilibre, de leur « zone d'indifférence », à l'intérieur
de laquelle un subordonné accepte, à peu de choses près,
n'importe quelle consigne [5J.
Les ordres seront donc en principe acceptables, et les
contremaîtres, les supérieurs immédiats, n'auront pas à exiger
l'impossible de leurs hommes. Cela ne signifie pas qu'à l' échelon
supérieur de commande il faille pour autant prévoir les
répercussions fines des instructions centrifuges, descendantes.
Justement pas. Si les mécanismes de commande ont été élaborés
dans une perspective cybernétique, des services entiers seront
conceptualisés sous la forme de « boîtes noires» dônt l'équilibre
dynamique sera assuré par la régulation de l'ensemble de
telles boîtes par l'échelon supérieur de commande. Elles seront
(\ noires» pour cet échelon supérieur, et auront ainsi différents
comportements internes possibles mais admissibles. A l'intérieur,
elles seront évidemment « claires » pour le chef de service
et ses hommes. Et le commandement consistera précisément
à trouver l'ajustement nécessaire dans ces relations
humaines internes afin de demeurer à l'intérieur de limites