03.07.2013 Views

La reconnaissance : un enjeu pour la sortie de la ... - Archipel - UQAM

La reconnaissance : un enjeu pour la sortie de la ... - Archipel - UQAM

La reconnaissance : un enjeu pour la sortie de la ... - Archipel - UQAM

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

Troisième partie: présentation <strong>de</strong>s résultats - Chapitre 5<br />

jalouse d'elle et <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie qu'elle mène, alors qu'elle-même à son âge était tenue <strong>de</strong> s'occuper <strong>de</strong><br />

sa fille. Jeff pense que sa mère n'était peut-être pas prête à avoir <strong>de</strong>s enfants et qu'elle ne sait<br />

donc pas comment s'y prendre avec lui.<br />

[Ma mère] est Ir<strong>la</strong>ndaise, pis on dirait, elle est froi<strong>de</strong>, tsé, c'est comme... je sais pas... c'est<br />

dans son caractère comme ça. Pis je par<strong>la</strong>is même avec mon psychologue, pis il disait:<br />

«Peut-être que ta mère, elle était pas faite <strong>pour</strong> avoir <strong>de</strong>s enfants, tsé. Peut-être qu'elle était<br />

pas équipée psychologiquement <strong>pour</strong> avoir <strong>de</strong>s enfants, tsé ». Ça se peut. Je sais qu'elle a eu<br />

huit fausses-couches (Jeff, 31 ans, sorti <strong>de</strong>puis 3 ans).<br />

Même si leurs parents ne leur reprochent pas d'exister, comme lorsqu'ils étaient je<strong>un</strong>es, le fait<br />

qu'ils semblent résister à investir <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion avec eux ne permet pas à ces répondants <strong>de</strong> trouver<br />

<strong>un</strong>e réponse suffisante à leurs attentes <strong>de</strong> <strong>reconnaissance</strong>. Conscients <strong>de</strong>s résistances <strong>de</strong> leurs<br />

parents à les reconnaître en tant que je<strong>un</strong>es <strong>de</strong> <strong>la</strong> rue, ces répondants pensaient toutefois qu'en<br />

s'appropriant <strong>un</strong>e nouvelle p<strong>la</strong>ce sociale, davantage valorisée par leurs parents - par exemple, en<br />

travail<strong>la</strong>nt, en al<strong>la</strong>nt à J'école, en se stabilisant au niveau du logement -, ils obtiendraient leur<br />

<strong>reconnaissance</strong>. C'est d'ailleurs souvent ce que leurs parents leur <strong>la</strong>issent entendre, comme le<br />

père <strong>de</strong> David, qui lui dit qu'il est fier <strong>de</strong> lui. Ces paroles ne se traduisent toutefois pas dans ses<br />

actes, ce qui fait dire à David que les efforts qu'il a faits <strong>pour</strong> sortir <strong>de</strong> <strong>la</strong> rue ne semblent pas être<br />

suffisants aux yeux <strong>de</strong> son père.<br />

Quand moi j'étais dans <strong>la</strong> rue pis tout, il sait ce que j'ai vécu, ce que j'ai passé. Pis c'est ça<br />

que je te dis, quand je suis allé à Noël passé, je lui ai dit. Il savait que j'ai suivi <strong>un</strong> cours, pis<br />

que je me suis sorti <strong>de</strong> <strong>la</strong> rue, que je me suis mis à travailler. Lui il a toujours voulu que je<br />

travaille, pis que je fasse quelque chose <strong>de</strong> bon dans <strong>la</strong> vie pis que je sois <strong>un</strong>e bonne personne<br />

pis <strong>un</strong> bon citoyen. Pis même là, j'arrive avec ça, le fait accompli: « Ah, je suis bien fier <strong>de</strong><br />

toi, nanana », mais ça s'arrête là, il m'appelle pas. Faudrait que je le rappelle. Mais à <strong>un</strong><br />

moment donné, je veux que ça vienne <strong>de</strong> lui, pis ça vient pas <strong>de</strong> lui (David, 31 ans, sorti<br />

<strong>de</strong>puis 4 ans).<br />

David perçoit <strong>la</strong> même distance <strong>de</strong> <strong>la</strong> part <strong>de</strong> son frère, avec qui il n'entretient qu'<strong>un</strong>e re<strong>la</strong>tion<br />

superficielle, alors qu'il aimerait avoir <strong>un</strong>e re<strong>la</strong>tion plus affective, qu'il compare à <strong>de</strong> l'amitié.<br />

Lorsque nous lui avons <strong>de</strong>mandé ce qu'il pense <strong>de</strong> <strong>la</strong> perception <strong>de</strong> son frère à son égard, il nous<br />

a répondu qu'il se <strong>de</strong>man<strong>de</strong> si son frère n'exprime pas, par son attitu<strong>de</strong> froi<strong>de</strong> et distante, <strong>un</strong><br />

certain rejet <strong>de</strong> son passé <strong>de</strong> rue et <strong>de</strong> toxicomanie. Il associe d'ailleurs l'attitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> son frère à<br />

celle <strong>de</strong> son père et c'est comme si son attitu<strong>de</strong> ne faisait que renforcer son impression <strong>de</strong> ne pas<br />

exister aux yeux <strong>de</strong>s hommes <strong>de</strong> sa famille.<br />

227

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!