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La reconnaissance : un enjeu pour la sortie de la ... - Archipel - UQAM

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Troisième partie : présentation <strong>de</strong>s résultats - Chapitre 7<br />

risques qu'ils prenaient en jouant avec leur vie. Celle-ci a alors pris <strong>un</strong>e valeur nouvelle, ils se<br />

sonl rendu compte qu'en fait, ils tenaient à vivre et que s'ils continuaient à jouer avec <strong>la</strong> limite <strong>de</strong><br />

leur vie, ils pouvaient vraiment <strong>la</strong> perdre.<br />

Le docteur se posait <strong>de</strong>s questions, comment ça se faisait que j'avais toughé longtemps <strong>de</strong><br />

même. Tsé, j'ai frôlé <strong>la</strong> mort, je suis allé en prison, quelque part, je veux pas mourir. A<br />

quelque part, j'aimais pas <strong>la</strong> vie, mais là je J'aime en hostie! Quand tu passes comme ça<br />

proche <strong>de</strong> <strong>la</strong> mort, t'apprécies <strong>la</strong> vie en sale! Quand tu te réveilles pis, hostie, je suis pas<br />

mort! Wow! Allume le cave, change-là ta vie! (Vincent, 25 ans, sorti <strong>de</strong>puis 2 ans).<br />

Une autre façon <strong>de</strong> rencontrer sa limite est d'être confronté à <strong>un</strong>e image <strong>de</strong> soi-même<br />

représentant <strong>un</strong>e négation <strong>de</strong> son existence, comme <strong>la</strong> mort, <strong>la</strong> déchéance ou encore l'insensé.<br />

Camille raconte que lorsqu'elle s'est vue à <strong>la</strong> télévision sous l'emprise <strong>de</strong> drogues, elle s'est vue<br />

comme <strong>un</strong>e « marionnette» sans vie et que cette vision l'a poussée à s'approprier <strong>un</strong>e position<br />

dans <strong>la</strong>quelle elle <strong>pour</strong>rait davantage affirmer son existence. Sandra mentionne <strong>un</strong> épiso<strong>de</strong> où elle<br />

a vu <strong>un</strong>e je<strong>un</strong>e fille dans <strong>un</strong>e piquerie, qui ne faisait auc<strong>un</strong> cas <strong>de</strong> son manque d'hygiène apparent<br />

(et honteux) et qui essayait en vain <strong>de</strong> s'injecter <strong>de</strong> <strong>la</strong> drogue avec <strong>un</strong>e seringue bouchée. Elle<br />

explique qu'elle s'est reconnue en elle lorsqu'elle avait cet âge-là et elle a pris conscience que ce<br />

n'é<strong>la</strong>it pas en tant que telle qu'elle vou<strong>la</strong>it être reconnue. Vincent mentionne <strong>la</strong> perspective <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

déchéance associée au vieillissement dans le milieu <strong>de</strong> <strong>la</strong> prostitution. Il explique qu'il se rend<br />

compte que <strong>la</strong> <strong>reconnaissance</strong> sociale qu'il obtient à travers ses pratiques <strong>de</strong> prostitution <strong>de</strong> luxe<br />

est associée à <strong>la</strong> je<strong>un</strong>esse <strong>de</strong> son corps et qu'en vieillissant, il sera plutôt rejeté <strong>de</strong> ce milieu. En<br />

effet, selon Dorais et Ménard (1987 : 35), <strong>la</strong> je<strong>un</strong>esse est particulièrement prisée par les clients <strong>de</strong><br />

prostitués masculins. En vieillissant, Vincent ne <strong>pour</strong>ra donc plus exister à travers sa position <strong>de</strong><br />

prostitué (ou difficilement).<br />

Je veux travailler, parce que si je continue là-<strong>de</strong>dans, ah ben c'est bien beau, je peux faire <strong>de</strong><br />

l'argent <strong>un</strong> autre cinq-six ans, mais à <strong>un</strong> moment donné je vais être rendu trop vieux. Un<br />

bonhomme <strong>de</strong> quarante ans qui veut <strong>un</strong> petit je<strong>un</strong>e, il ira pas chercher <strong>un</strong> gars <strong>de</strong> trente-cinq<br />

ans s'il en a <strong>un</strong> <strong>de</strong> dix-huit sur le coin. Il est juste temps que je me réveille, parce que là, mon<br />

règne, il est à <strong>la</strong> veille <strong>de</strong> finir là-<strong>de</strong>dans, pis je veux pas être sur Je BS quand j'aurai trentecinq<br />

ans (Vincent, 25 ans, sorti <strong>de</strong>puis 2 ans).<br />

À travers toutes ces expériences, c'est <strong>la</strong> conscience <strong>de</strong> <strong>la</strong> mort (sociale et/ou physique) qui<br />

apparaît et que les répondants expriment à travers <strong>de</strong>s expressions telles que « allumer» ou « se<br />

réveiller ». Comme si alors, face à J'image honible <strong>de</strong> <strong>la</strong> mort (l'homme en train <strong>de</strong> mourir d'<strong>un</strong>e<br />

overdose dans le cas <strong>de</strong> Sandra ou encore, le cadavre ou le Juif mort dans <strong>un</strong> camp <strong>de</strong><br />

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