La nouvelle économie industrielle - Institut Coppet

186 LA« NOUVELLE ÉCONOMIE» INDUSTRIELLE
Les lois antitrust de 1890 ne doivent rien à la théorie
économique
Avec cette mutation conceptuelle s'ouvre alors la route
qui conduit à la généralisation de l'idée que la concurrence
est un état lié au degré de concentration des structures
industrielles. Et donc, par ricochet, à la conclusion
que la grande entreprise, celle qui réussit, qui fait plus de
profit que les autres, qui résiste durablement à des
concurrents parce qu'elle sait rester plus efficace, loin
d'être une bénédiction pour le consommateur et un facteur
de progrès pour tous, est un « fléau» économique et
social ( ... sauf lorsque des fonctionnaires ou des juges spécifiquement
«éclairés» par la Grâce en décident autrement!).
Lorsqu'en 1890 le Sénat américain ratifie les clauses
antitrusts du Sherman Act, on est encore bien loin d'une
telle situation. Le Sherman Act est une opération exclusivement
politique, menée par les dirigeants républicains
de l'époque pour récupérer le soutien électoral des
métiers et professions les plus touchés par les bouleversements
technologiques et la seconde révolution industrielle
de la fin du XIX· siècle. L'Amérique subit alors un déluge
de démagogie populiste qui prend pour cible tout ce qui
incarne les succès du « big business» capitaliste. D'où le
succès du Sherman Act, voté à l'unanimité moins une
voix. Mais les économistes de l'époque, même les plus
libéraux (dans le sens anglo-saxon, comme Richard
T. Ely, le fondateur de l'American Economic Association),
n'y sont absolument pour rien. Leur attitude est au
contraire de prendre la défense des « trusts» en attirant
l'attention de leurs concitoyens sur le fait que, dans le
contexte de l'époque (baisses vertigineuses des coûts de
l'énergie et des transports), l'essor des grands groupes
industriels est moins une attaque au principe de la libre
concurrence, que la marque et le produit même d'une
concurrence effrénée, qui n'a nul besoin d'être «protégée»
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