La nouvelle économie industrielle - Institut Coppet

96 LA «NOUVELLE ÉCONOMIE» INDUSTRIELLE
ensuite partagées entre les entreprises ainsi protégées
contre l'entrée de nouveaux compétiteurs plus dynamiques,
et les autorités de tutelle chargées de mettre en
place puis d'administrer l'application des règlements.
Nous en déduisons que la théorie traditionnelle (ou
moderne) du monopole naturel n'est en fait qu'un alibi,
une «théorie-couverture », offerte à leur insu par les
économistes à des groupes de pression dont les avantages
acquis se sont ainsi trouvés socialement légitimés et politiquement
protégés. Nous ne sommes pas loin de penser
que ses arguments reposent sur des raisonnements qui
n'ont été inventés que pour protéger des duretés de la
concurrence un certain nombre d'intérêts industriels, professionnels
ou administratifs bénéficiant, à un certain
moment de l'histoire, d'une position politique privilégiée.
Il y a une vingtaine d'années, l'historien américain
Gabriel Kolko ajoutait au crédit de cette thèse en démontrant
que la création de l'Interstate Commerce Commission
(ICC), au début de ce siècle, n'avait rien à voir avec
un quelconque souci du gouvernement américain de protéger
les utilisateurs contre les abus monopolistiques des
grands cartels de compagnies de chemin de fer, mais était
au contraire, le produit des efforts de ces cartels pour
obtenir de l'Etat qu'il impose par la contrainte de la force
publique la discipline qu'ils n'arrivaient pas à faire librement
accepter par leurs membres 2.
Depuis lors d'autres études ont été réalisées. Une
ancienne journaliste du Wall Street Journal. Ida Walters
s'est penchée sur l'histoire, des origines de la réglementation
des Télécoms aux Etats-Unis 3. Ronald Coase a
étudié le processus qui a conduit, dans les années vingt, à
la nationalisation de l'espace hertzien américain 4. Des
économistes ont entrepris de reconstituer le climat qui
entoura les débuts de l'intervention des pouvoirs publics
dans la régulation de la production et de la distribution
d'énergie électrique 5. Leurs travaux mettent fort à mal la
thèse traditionnelle selon laquelle l'offre de réglementation
répondrait prioritairement au souci de servir