La nouvelle économie industrielle - Institut Coppet

426 LA« NOUVELLE ÉCONOMIE» INDUSTRIELLE
aux contrats qui en sont le support une contrainte légale qui la
condamne. Ce n'est pas logique.
J'ai posé au départ que tous les magasins continuaient de respecter
les mêmes règles du jeu et de remplir scrupuleusement
les obligations imposées par leur cahier des charges. Ce n'est
qu'ensuite, au fur et à mesure qu'il apparaît que les promesses
de revenus « achetées» par les franchisés ne seront plus tenues,
que la situation se dégrade. Cependant, si l'on veut être réaliste,
c'est dès le début que l'on risque, en cas d'interdiction des
clauses de non-concurrence, de voir se manifester des stratégies
individuelles de nature «opportuniste» incompatibles avec le
fonctionnement durable d'un système de distribution sélective.
Dans tout système contractuel, aussi bien conçu soit-il, il
existe en effet toujours une certaine marge de jeu qui tient à
l'incapacité du franchiseur de tout contrôler dans le détail, et
qui, dans certaines limites, permet au détaillant de «tricher»
avec ses obligations sans se faire détecter et sanctionner.
La Cour de justice, dans son arrêt Pronuptia, ne voit pas que
dès lors qu'un franchisé peut librement porter la concurrence
sur le territoire des autres membres du réseau, chacun sera naturellement
incité à user davantage de cette stratégie qui permet,
d'une part, d'abaisser ses propres coûts, d'autre part, de vendre
moins cher sur les territoires des autres tout en continuant de
bénéficier des avantages de l'image de marque produite par le
fait que les autres, eux, continuent de remplir leurs obligations
(ce qui rappelle la position des «discounters »).
On retrouve un problème classique de « passager clandestin »,
mais cette fois au sein même du réseau, et avec les mêmes effets
destructeurs. En empêchant les franchiseurs de maintenir des
règles internes de non-concurrence, on encourage un plus grand
nombre de magasins à se comporter en « passagers clandestins»
travaillant sur le dos de leurs confrères, et on contraint l'entreprise
à consacrer davantage de ressources à la surveillance et à
la détection de ces « resquilleurs» (alors même que le système
avait été conçu pour mimmiser cette sorte de coûts) ; ces effets
ont pour conséquence de renforcer le processus de déclin relatif
de la distribution sélective, et se retournent en définitive contre
les intérêts de tous les partenaires.
Conclusion: la conséquence de ce genre d'attitude sera d'inciter
les grandes entreprises productrices de biens de consommation
de masse à forte valeur ajoutée commerciale à se réorienter
davantage vers des formules d'intégration et cela alors même
que l'expérience du marché nous a révélé qu'il existait d'autres
formules possibles de coopération moins coûteuses et économiquement
plus efficientes. Toute la collectivité y perd; ce qui