La nouvelle économie industrielle - Institut Coppet

236 LA« NOUVELLE ÉCONOMIE» INDUSTRIELLE
chèques. C'est au magasin" T ... », cinquante mètres plus
loin, que les gens passent commande. On vient chez
"X ... » pour se renseigner, s'informer, voir comment ça
fonctionne, mais c'est chez" T ... » que l'on achète. C'est
logique: le même produit y vaut 500 F de moins. Et
lorsque l'objet tombe en panne, c'est chez" X ... », le seul
magasin équipé de la région, que l'on retourne pour exiger
le respect de la garantie offerte par le constructeur. Moralité:
c'est grâce aux efforts de promotion et d'investissement
commercial consentis par" X ... » que" T ... » réalise
son chiffre d'affaires. «T ... » se comporte en passager
clandestin voyageant sur le dos de " X ... ». "T ... » est ce
que les Américains appellent un «free rider ».
On peut penser qu'après tout ce n'est là que le jeu normal
de la concurrence. Regardons alors de plus près ce
qu'une telle situation implique.
Si la chaîne de supermarchés s'est engagée par contrat
à réaliser un certain volume d'investissements techniques
et commerciaux, c'est qu'elle espère en retirer, par
l'accroissement des ventes, au moins une certaine rentabilité
financière normale; sinon, mieux vaut consacrer ses
disponibilités à d'autres tâches. Or ce n'est pas du tout ce
qui se passe. La concurrence de «T ... » fait que ses
recettes restent si maigres qu'elles ne permettent même
pas d'amortir le capital ainsi investi. La sagesse conseille
d'arrêter là les frais. On baisse les prix pour les aligner sur
ceux du voisin, mais, simultanément, on commence par
rogner sur les dépenses de promotion et de démonstration,
puis sur l'après-vente et les tâches d'entretien. Puisqu'ils
coûtent plus cher qu'ils ne rapportent, on renonce à assurer
les services dont le fabricant jugeait nécessaire
l'accompagnement pour faire connaître et imposer son
produit face à la concurrence. On s'aligne sur le niveau de
prestations servies par celui qui en offre le moins: la présence
d'un « passager clandestin» entraîne la mort du service.
Même si en principe il devrait peu lui importer que ses
produits soient vendus par l'un ou l'autre des magasins,