Symposium - AIC

Arnaud Macé
genres, on ne peut produire de définition, car il faudrait qu'il existe un trait essentiel commun à des
choses de genre si différents, or cela n'existe pas, sinon par analogie. La nature du Beau, dans laquelle
la puissance du Bien s'est réfugiée 38 , traverse elle aussi de nombreux « genres » de choses, au sens où
Aristote emploierait ce terme. Elle est donc moins facile semble-t-il à définir qu'une vertu qui pourrait
se situer dans un genre de chose donné. La justice par exemple, nous savons qu'elle est dans l'âme ou
dans la cité. Or ce qui est le plus étonnant, c'est que ces Formes qui sont le plus étendues, et donc les
plus difficiles à définir, semble être celles qui ont le plus d'éclat parmi les choses sensibles. C'est une
autre leçon du Phèdre. La beauté rayonne sur ces choses avec une intensité particulière – plus que
toute autre forme, plus que la justice, la tempérance et les autres choses que l'âme estime, et dont les
imitations sont perçues de manière très affaiblies 39 . Au contraire, la beauté jouit du privilège d'être,
parmi toutes les formes, la plus éclatante dans ses propres images, et la plus désirée 40 . Il est donc plus
facile d'être ému par la beauté d'un visage que par le courage qui peut aussi pourtant s'y lire, comme
nous le rappelle Plotin 41 , mais plus difficilement. Il faut croire que le fait, pour une Forme, de n'être
liée, dans ses imitations, à aucun contenu descriptif particulier, laissant celles-ci se disperser dans la
plus grande hétérogénéité, lui offre aussi la capacité de se manifester avec le plus grand éclat.
38
Philèbe 64.e.5-6 Νῦν δὴ καταπέφευγεν ἡµῖν ἡ τοῦ ἀγαθοῦ δύναµις εἰς τὴν τοῦ καλοῦ φύσιν.
39
Phèdre 250b.
40
Phèdre 250c8.
41
Enneades 1, 6, 5,14 andrian blosuron ekhousan prosôpon.
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