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En quête de Perceval - Université Paris-Sorbonne

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l’édition mo<strong>de</strong>rne d’Alexandre Micha 163 ), puis une Queste <strong>de</strong>l Saint Graal, et enfin une Mort<br />

le Roi Artu. Ces six textes forment les branches du cycle que l’on a appelé le Lancelot-Graal,<br />

composé entre 1215 et 1230, et que l’on appelle aussi « cycle Vulgate ». Du point <strong>de</strong> vue qui<br />

nous concerne, le point le plus significatif à relever est que <strong>Perceval</strong> n’apparaît plus comme<br />

celui qui est <strong>de</strong>stiné à accomplir la <strong>quête</strong> du graal. Il reste parmi les meilleurs chevaliers du<br />

mon<strong>de</strong> et est un <strong>de</strong>s trois chevaliers qui, dans la Queste, arrivent jusqu’au graal, mais Bohort<br />

et lui n’accè<strong>de</strong>nt qu’à une révélation partielle <strong>de</strong>s mystères. Seul le très pur Galaad peut<br />

s’approcher du vase sacré et regar<strong>de</strong>r à l’intérieur, participant pleinement <strong>de</strong> sa grâce avant <strong>de</strong><br />

mourir dans une sorte d’extase.<br />

Ce changement <strong>de</strong> perspective, dont une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la tradition manuscrite permet <strong>de</strong> supposer<br />

qu’il s’est fait progressivement 164 à partir d’un modèle où le « bon chevalier » était <strong>Perceval</strong>,<br />

va <strong>de</strong> pair avec une modification profon<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’orientation même <strong>de</strong> la <strong>quête</strong>. Peut-être même<br />

cette modification est-elle la cause principale pour laquelle il était nécessaire, d’un point <strong>de</strong><br />

vue narratif, <strong>de</strong> remplacer <strong>Perceval</strong> par Galaad.<br />

Il n’y a pas lieu d’entrer ici dans <strong>de</strong> complexes hypothèses génétiques, mais contentons-nous<br />

<strong>de</strong> suggérer <strong>de</strong>ux pistes pour comprendre cette substitution : la première tient au fait que, <strong>de</strong><br />

façon très sensible, le Lancelot-Graal se construit à partir d’un double foyer constitué, comme<br />

son nom l’indique, autour <strong>de</strong> Lancelot et du Graal. Les <strong>de</strong>ux éléments, a priori, n’ont rien à<br />

faire ensemble. Les héros du graal, jusqu’à présent, étaient <strong>Perceval</strong> et Gauvain ; Lancelot<br />

était avant tout le chevalier amoureux <strong>de</strong> sa reine. Si la trilogie issue <strong>de</strong> Robert <strong>de</strong> Boron<br />

associait déjà, comme nous l’avons vu, l’eschatologie du graal aux chroniques arthuriennes<br />

inspirées <strong>de</strong> Wace, le Lancelot-Graal, loin d’atténuer cette dualité, la renforce au contraire en<br />

donnant une position centrale à Lancelot. La brève « Mort Artu » qui concluait le Didot-<br />

<strong>Perceval</strong> donnait déjà l’impression d’une sorte <strong>de</strong> postlu<strong>de</strong> ajouté après la « vraie » fin <strong>de</strong><br />

l’histoire, qui est le couronnement <strong>de</strong> <strong>Perceval</strong> comme roi du graal et la fin <strong>de</strong>s enchantements<br />

<strong>de</strong> Bretagne. Le Lancelot-Graal va plus loin dans ce sens, et il semble bien qu’il ait en<br />

quelque sorte <strong>de</strong>ux conclusions : la Queste et la Mort Artu, dont chacune conclut un <strong>de</strong>s pôles<br />

du texte, respectivement par l’aboutissement <strong>de</strong> la <strong>quête</strong> et par la <strong>de</strong>struction du mon<strong>de</strong><br />

arthurien.<br />

163 Lancelot. Roman en prose du XIIIe siècle, éd. Alexandre Micha, Genève: Droz, "Textes littéraires français",<br />

1978-83. Cf. aussi, pour le reste du cycle, l’ancienne édition <strong>de</strong> Sommer : The Vulgate version of the Arthurian<br />

romances, éd. Heinrich Oskar Sommer, Washington: Carnegie Institution, 1909-16.<br />

164 Je reviendrai plus loin sur quelques points problématiques (cf. ci-<strong>de</strong>ssous p. 374).<br />

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