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En quête de Perceval - Université Paris-Sorbonne

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Quant à l’ermite, les connaissances qu’il manifeste posent moins <strong>de</strong> problème : rien ne<br />

s’oppose logiquement à ce qu’il soit au courant <strong>de</strong> ce qu’il révèle à <strong>Perceval</strong>, si en effet le Roi<br />

Pêcheur est son neveu. Mais rien, en soi, n’interdit qu’on le conçoive comme une expression<br />

matérialisée d’un apaisement qui se fait, après cinq années d’errances, dans le cœur <strong>de</strong><br />

<strong>Perceval</strong> – comme une sorte <strong>de</strong> voix intérieure, même si sa parole n’a pas ce caractère<br />

oraculaire qui marque les vérités incontestables proférées par la cousine ou la Demoiselle<br />

Hi<strong>de</strong>use 799 .<br />

Le caractère fantasmé du Roi Pêcheur et <strong>de</strong> son château expliquerait, comme nous l’avons<br />

déjà vu, les difficultés géographiques que le texte propose ouvertement à notre sagacité ; il<br />

rendrait également logique la similitu<strong>de</strong> frappante qui se <strong>de</strong>ssine, à travers le motif <strong>de</strong> la<br />

blessure parmi les jambes, entre cette figure et le père <strong>de</strong> <strong>Perceval</strong>, la représentation que le<br />

texte nous donne du Roi Pêcheur correspondant certainement à la meilleure image que<br />

<strong>Perceval</strong> puisse se faire <strong>de</strong> son propre père, à partir <strong>de</strong> ce qu’il en sait.<br />

<strong>En</strong> outre, une autre difficulté du texte serait évacuée par cette hypothèse poussée dans ses<br />

<strong>de</strong>rniers retranchements : si <strong>Perceval</strong> a rêvé toute cette scène, il n’est pas surprenant qu’il ne<br />

soit plus question, dans la suite du texte, <strong>de</strong> l’épée que le roi lui a donnée. Nous verrons un<br />

peu plus loin (cf. ci-<strong>de</strong>ssous p. 542) que plusieurs interpolations ont été tentées à propos <strong>de</strong><br />

cette épée, suscitées en particulier par l’importance qu’elle revêt dans les Continuations ; mais<br />

le fait que l’épée <strong>de</strong> <strong>Perceval</strong> ne se brise pas lors du combat qu’il mène contre l’Orgueilleux,<br />

plutôt que d’être imputé à une négligence <strong>de</strong> l’auteur, comme les interpolateurs le suggèrent<br />

implicitement, <strong>de</strong>vrait plutôt être lu comme la meilleure preuve que tout cela n’était qu’un<br />

rêve. Au contraire du <strong>Perceval</strong> <strong>de</strong> la Quatrième Continuation qui pourra s’assurer <strong>de</strong> ne pas<br />

avoir rêvé son passage au Paradis terrestre grâce au brief qu’il en ramène (cf. ci-<strong>de</strong>ssous<br />

p. 515) 800 , au contraire <strong>de</strong> Cahus qui, au début du Perlesvaus, ressort <strong>de</strong> son rêve avec un<br />

couteau réellement planté dans le cœur, <strong>Perceval</strong>, ici, ne gar<strong>de</strong> pas dans son fourreau l’épée<br />

belle mais friable qui, dans son rêve, lui avait été remise par cette figure paternelle<br />

méhaigniée…<br />

799 Rappelons l’interprétation <strong>de</strong> « Gertru<strong>de</strong> Schoepperle Loomis », selon laquelle l’ermite se livrerait à une<br />

analyse <strong>de</strong> rêve : dans ce cas, le « je crois » du v. 6417 (cf. ci-<strong>de</strong>ssus p. 352) irait précisément dans le sens <strong>de</strong><br />

l’irréalité du Roi Pêcheur, du moins tel que <strong>Perceval</strong> se l’est représenté.<br />

800 Francis Dubost compare d’ailleurs le château du graal et le Paradis terrestre <strong>de</strong> la Quatrième Continuation,<br />

suggérant que le premier pourrait bien partager avec le second l’intermittence <strong>de</strong> ses manifestations (DUBOST,<br />

Aspects fantastiques <strong>de</strong> la littérature narrative médiévale (XIIème-XIIIème siècles), p. 365).<br />

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