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En quête de Perceval - Université Paris-Sorbonne

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acceptent <strong>de</strong> l’entendre, après l’avoir interrogé et avoir appris qu’il a suivi pour tout<br />

enseignement le chant <strong>de</strong>s oiseaux... Son chant, évi<strong>de</strong>mment, est totalement hors <strong>de</strong>s règles<br />

sacro-saintes selon lesquelles « il faut » composer, et Beckmesser, le plus dogmatique <strong>de</strong>s<br />

Maîtres, a tôt fait <strong>de</strong> remplir son ardoise <strong>de</strong> traits indiquant les fautes contre la tablature. Les<br />

Maîtres, dans l’ensemble, ne comprennent rien à l’hymne enflammé <strong>de</strong> Walther, même si<br />

certains sont troublés ; seul Hans Sachs entend dans ce chant une beauté certes confuse, mais<br />

puissante. Il s’attachera à instruire Walther <strong>de</strong>s règles indispensables pour cadrer son génie<br />

naturel ; ils travailleront ensemble à préparer la pièce grâce à laquelle Walther remportera<br />

aisément le concours.<br />

Sans qu’il soit nécessaire d’entrer dans le détail <strong>de</strong> la poétique qui résulte <strong>de</strong> cette<br />

construction, on peut noter simplement que les Maîtres Chanteurs racontent comment l’art<br />

formel et sclérosé <strong>de</strong>s Maîtres doit être rénové par une puissance créatrice instinctive,<br />

acceptant toutefois <strong>de</strong> couler son énergie dans un moule qui ren<strong>de</strong> cet art nouveau recevable<br />

pour le grand nombre – car ce ne sont pas que les Maîtres qui acclament Walther à la fin <strong>de</strong><br />

l’opéra, mais le peuple dans son entier.<br />

Dans Parsifal, la question <strong>de</strong> l’art n’est pas posée directement ; les réflexions contemporaines<br />

autour <strong>de</strong> la notion <strong>de</strong> Kunstreligion nous invitent toutefois à prêter une oreille attentive à<br />

d’éventuels échos d’art poétique qui pourraient, néanmoins, s’en dégager.<br />

A ce titre, la comparaison avec les Maîtres Chanteurs est très éclairante. Dans un cas comme<br />

dans l’autre, le 1 er acte présente l’arrivée d’un jeune homme intuitif et « dépourvu d’érudition,<br />

sans académie », comme disait Wagner à propos <strong>de</strong> Parsifal. Dans les <strong>de</strong>ux cas, le jeune<br />

homme suscite l’espoir d’un homme plus âgé, soupçonnant qu’il est peut-être celui que l’on<br />

(que l’art/que le mon<strong>de</strong> du graal) attend, mais la première épreuve à laquelle il est soumis se<br />

sol<strong>de</strong> par un échec. Dans les <strong>de</strong>ux cas, pourtant, il semble que l’échec ne soit pas<br />

irrémédiable, et si Gurnemanz, contrairement à Sachs, perd l’espoir qu’il avait initialement<br />

nourri, il faut se rappeler pourtant que Parsifal, au plus fort <strong>de</strong> la plainte d’Amfortas, a<br />

vivement porté la main à son cœur, comme le précise la didascalie.<br />

A cela succè<strong>de</strong> un apprentissage, qui prend <strong>de</strong>s formes très différentes dans les <strong>de</strong>ux cas :<br />

Walther doit suivre les leçons <strong>de</strong> Sachs pour intégrer les règles qui lui permettront <strong>de</strong> rendre<br />

son chant communicable. Parsifal, <strong>de</strong> son côté, reçoit sa leçon sans passer par un quelconque<br />

maître, et ce que Walther assimile lors <strong>de</strong> son rapi<strong>de</strong> passage sur les bancs d’école, Parsifal<br />

l’intègre d’un seul coup par le truchement du baiser <strong>de</strong> Kundry. On peut relever que, dans les<br />

<strong>de</strong>ux cas, la « leçon » consiste à rediriger quelque chose qui a trait à un instinct sensuel brut :<br />

l’attraction érotique <strong>de</strong> Kundry, ou le rêve empreint <strong>de</strong> sensualité sur lequel Walther compose<br />

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