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En quête de Perceval - Université Paris-Sorbonne

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Cette légèreté <strong>de</strong> ton se retrouve tout au long du poème, mais c’est sans aucun doute aux<br />

passages mettant en scène <strong>Perceval</strong> qu’en revient la palme. Peut-être est-ce parce qu’il ne<br />

partage pas avec Tristan et Lancelot le privilège d’être né sur les bords <strong>de</strong> la Loire… Quoi<br />

qu’il en soit, Creuzé a résolument opté pour une peinture plaisante <strong>de</strong> son <strong>Perceval</strong>, et il<br />

transforme plusieurs éléments <strong>de</strong> l’histoire pour accentuer cette dimension. Si nous avons pu<br />

prendre quelquefois Tressan en flagrant délit d’invention, Creuzé, pour sa part, donne souvent<br />

libre cours à son imagination, pour agrémenter la trame a priori très lâche <strong>de</strong> sa composition.<br />

C’est cette trame, d’ailleurs, qui est l’objet <strong>de</strong>s premiers vers du poème, dans lesquels Creuzé<br />

prévient les reproches qui pourraient lui être faits, et justifie d’avance le manque d’unité <strong>de</strong><br />

son texte :<br />

Mais n’allez pas, ô censeurs que je prise,<br />

Chercher, vouloir, parmi tant <strong>de</strong> portraits,<br />

Un seul modèle, une seule entreprise :<br />

Ce n’est point là ce que je vous promets.<br />

L’ordre fameux, dit <strong>de</strong> la Table ron<strong>de</strong>,<br />

De mon poëme est l’unité fécon<strong>de</strong>,<br />

Et <strong>de</strong> cet ordre on va, dans mon <strong>de</strong>ssein,<br />

Voir le début, le progrès et la fin.<br />

Si je n’ai pu, par une étroite chaîne<br />

Unir entre eux ses héros différents,<br />

Un fil léger suit leur course incertaine :<br />

Puisque je peins <strong>de</strong>s chevaliers errants,<br />

On ne peut pas vouloir que je les mène.<br />

Je les suis donc. Leurs exploits retracés,<br />

Épars ailleurs, ici se réunissent. (p. 2)<br />

Comme dans le Lancelot-Graal, comme dans le Tristan en prose, comme dans Le Morte<br />

Darthur, il ne s’agit pas ici d’isoler un fil particulier <strong>de</strong> ce vaste ensemble qu’est la matière<br />

arthurienne, mais <strong>de</strong> tisser l’ensemble pour produire une large tapisserie où tout ce mon<strong>de</strong> se<br />

trouve représenté. Creuzé, toutefois, se limite à la <strong>de</strong>rnière génération <strong>de</strong>s chevaliers<br />

arthuriens et ne remonte pas à Uther Pendragon ou à la naissance <strong>de</strong> Merlin. Son récit<br />

s’organise globalement autour <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux pôles que sont la Table ron<strong>de</strong> et le « saint Gréal »,<br />

mais cette polarisation reste relativement superficielle et ne fonctionne que comme un fil<br />

rouge très ténu.<br />

Pourtant, on sent dès la préface que si la Table ron<strong>de</strong> est simplement un lieu autour duquel<br />

gravitent les aventures et auquel les chevaliers reviennent épisodiquement, le saint Gréal, en<br />

revanche, pose plus <strong>de</strong> problèmes à Creuzé. L’auteur est manifestement gêné par ce qu’il<br />

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