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En quête de Perceval - Université Paris-Sorbonne

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comme le grand pionnier d’une nouvelle métho<strong>de</strong> d’édition que l’on peut qualifier <strong>de</strong><br />

« scientifique » ou <strong>de</strong> « positiviste », et dont l’influence a profondément marqué les étu<strong>de</strong>s<br />

médiévales. Ses travaux contribuent largement à faire passer l’édition <strong>de</strong> textes médiévaux<br />

d’une « pério<strong>de</strong> empirique » à une « pério<strong>de</strong> scientifique », pour reprendre les distinctions<br />

d’Alfred Foulet et Mary Blakely Speer 291 . Alain Corbellari note le caractère oxymorique <strong>de</strong> ce<br />

positivisme « fils du romantisme » 292 , et en effet, c’est un aspect intéressant du regard que le<br />

premier XIXème siècle porte sur le Moyen Âge que cette ambivalence constitutive entre une<br />

recherche <strong>de</strong> scientificité et une forme d’enthousiasme (non dénué d’une certaine ambiguïté)<br />

pour la découverte <strong>de</strong>s « antiquités nationales ». Mais si les motifs nationalistes ou même<br />

régionalistes font parfois obstacle à une intelligence impartiale <strong>de</strong>s textes, et si les querelles<br />

portant sur la localisation <strong>de</strong>s origines prennent une place sans doute excessive dans les débats<br />

<strong>de</strong> cette première génération <strong>de</strong> médiévistes français, la question <strong>de</strong>s origines est certainement<br />

pour beaucoup dans la vivacité <strong>de</strong>s passions que ces textes ont pu susciter chez eux. Certes,<br />

Paulin <strong>Paris</strong> n’est pas un modèle <strong>de</strong> la rigueur philologique telle que nous la concevons<br />

aujourd’hui 293 , mais on ne peut qu’admirer la ferveur avec laquelle il s’est plongé dans les<br />

vieux manuscrits. Qu’on en juge seulement par cette éloquente tira<strong>de</strong> :<br />

Combien <strong>de</strong> romans et <strong>de</strong> gazettes ai-je fermés pour étudier plus longtemps ces<br />

admirables compositions, images <strong>de</strong> l’esprit, <strong>de</strong>s mœurs et <strong>de</strong>s croyances <strong>de</strong> nos<br />

ancêtres ! Combien <strong>de</strong> fois alors n’ai-je pas mis un frein à mon enthousiasme, en me<br />

rappelant avec une sorte d’effroi l’aventure du chevalier <strong>de</strong> la Manche ! Honnête Don<br />

Quichotte ! Les romans coupables <strong>de</strong> ta folie n’étaient que <strong>de</strong> longues paraphrases<br />

décolorées <strong>de</strong>s Chansons <strong>de</strong> geste ; que serais-tu <strong>de</strong>venu si tu avais lu les<br />

originaux ! 294<br />

C’est avec une pointe <strong>de</strong> nostalgie que Michel Zink évoque cette ferveur : « on se surprend à<br />

regretter <strong>de</strong> ne pouvoir adhérer à la vision romantique du Moyen Âge, pourtant erronée à peu<br />

près en tout point » 295 .<br />

291<br />

ALFRED FOULET et MARY BLAKELY SPEER, On Editing Old French Texts, Lawrence: The Regents Press of<br />

Kansas, 1979, pp. 3-19.<br />

292<br />

ALAIN CORBELLARI, Joseph Bédier, écrivain et philologue, Genève: Droz, "Publications romanes et<br />

françaises", 1997, p. 523.<br />

293<br />

Bernard Cerquiglini est sans doute un peu injuste en le décrivant comme « le type même du romaniste<br />

première manière, fait d’intuitions aimables et <strong>de</strong> romantisme » (BERNARD CERQUIGLINI, Eloge <strong>de</strong> la variante.<br />

Histoire critique <strong>de</strong> la philologie, <strong>Paris</strong>: Seuil, 1989, p. 79), mais les violentes attaques <strong>de</strong> François Génin à<br />

l’encontre <strong>de</strong> Paulin <strong>Paris</strong>, autour <strong>de</strong> 1850, attestent néanmoins que la rigueur philologique <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier n’était<br />

pas toujours impeccable (Cf. FRANÇOIS GENIN, Lettre à M. Paulin <strong>Paris</strong>, membre <strong>de</strong> l'Institut, <strong>Paris</strong>: Firmin-<br />

Didot, 1851).<br />

294<br />

PAULIN PARIS, Li Romans <strong>de</strong> Garin le Loherain, <strong>Paris</strong>: Techener, 1833, p. 3.<br />

295<br />

MICHEL ZINK, Le Moyen Âge et ses chansons, ou un passé en trompe-l’oeil, <strong>Paris</strong>: <strong>de</strong> Fallois, 1996, p. 28.<br />

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