30.06.2013 Views

En quête de Perceval - Université Paris-Sorbonne

En quête de Perceval - Université Paris-Sorbonne

En quête de Perceval - Université Paris-Sorbonne

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

Nous retrouvons donc, dans cette rapi<strong>de</strong> déclinaison <strong>de</strong> quelques exemples <strong>de</strong> graals<br />

« textualisés », la dichotomie qui apparaissait déjà, dans les premières pages <strong>de</strong> ce chapitre,<br />

entre les visions du graal engagées par la métaphore <strong>de</strong> l’épée brisée d’une part, et <strong>de</strong> l’autre,<br />

par la vision du graal comme signe à déchiffrer. D’un côté, la <strong>quête</strong> <strong>de</strong> <strong>Perceval</strong> est associée à<br />

celle <strong>de</strong> l’écrivain ; <strong>de</strong> l’autre, à celle du lecteur.<br />

6. Semblance et senefiance<br />

Cette question du graal comme signe est au cœur <strong>de</strong> la réflexion que mène Mireille Séguy,<br />

tout au long <strong>de</strong> son ouvrage Les Romans du Graal ou le signe imaginé. Réfléchissant à cette<br />

notion dans <strong>de</strong>s termes qui étaient pensables à l’époque <strong>de</strong>s textes en question, elle prend soin<br />

<strong>de</strong> bien distinguer les <strong>de</strong>ux faces du signe que sont, dans le lexique médiéval, la senefiance et<br />

la semblance.<br />

Il semble […] que la semblance et la senefiance désignent <strong>de</strong>ux caractéristiques<br />

contradictoires du signe. D’un côté le signe représente une chose ; il « fait signe »<br />

vers cette chose qui doit être reconnaissable à travers lui : il est senefiance. D’un<br />

autre côté, le signe possè<strong>de</strong> une réalité qui lui est propre : il est semblance. […] Le<br />

signe est par nature à la fois transparent et opaque. Transparent, il s’efface <strong>de</strong>rrière<br />

cet autre dont il est la marque : il se rapproche alors <strong>de</strong> la senefiance aux dépens <strong>de</strong><br />

la semblance. Opaque, il voile ce qu’il signifie au profit <strong>de</strong> ce par quoi il signifie : la<br />

semblance apparaît alors non plus comme le moyen par lequel la senefiance advient,<br />

mais comme l’écran <strong>de</strong>rrière lequel elle vient s’obscurcir. 772<br />

Cette distinction me paraît parfaitement opératoire pour penser la séparation entre les figures<br />

<strong>de</strong> <strong>Perceval</strong> comme lecteur ou comme scripteur : dans le premier cas, il s’agit, pour notre<br />

personnage, <strong>de</strong> mettre une senefiance sous une semblance ; dans le second, <strong>de</strong> donner une<br />

semblance à une senefiance.<br />

La <strong>quête</strong> du <strong>Perceval</strong> lecteur consisterait donc à mettre une senefiance sous une semblance,<br />

c’est-à-dire à réduire par un effort interprétatif l’opacité d’un signe, à accé<strong>de</strong>r à la<br />

signification intime d’une forme. C’est l’image privilégiée, sans doute, qui se dégage du<br />

<strong>Perceval</strong> interrogateur, sollicité par l’opacité du « rébus » que représente à ses yeux le cortège<br />

du graal.<br />

772 SEGUY, Les Romans du Graal ou le signe imaginé, p. 137.<br />

490

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!