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En quête de Perceval - Université Paris-Sorbonne

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elationnels à travers Wagner et Gracq permet <strong>de</strong> parvenir, avec Le Rivage <strong>de</strong>s Syrtes, à une<br />

dissociation radicale du « mythe » <strong>de</strong> <strong>Perceval</strong> et <strong>de</strong> son « histoire ». Le Rivage <strong>de</strong>s Syrtes ne<br />

nous raconte en aucune manière l’histoire <strong>de</strong> <strong>Perceval</strong> ; compte tenu, en outre, <strong>de</strong> la rareté<br />

d’éléments renvoyant à un intertexte externe à l’œuvre <strong>de</strong> Gracq, rien ne nous aurait permis<br />

<strong>de</strong> dépister la présence <strong>de</strong> <strong>Perceval</strong> dans ce roman sans passer par un parcours méticuleux <strong>de</strong><br />

l’œuvre gracquienne, texte après texte. Si Gracq avait brûlé tous ses textes pour ne livrer à la<br />

publication que Le Rivage <strong>de</strong>s Syrtes, jamais nous n’aurions trouvé dans ce roman la moindre<br />

trace du mythe percevalien. Pourtant, j’espère avoir su montrer <strong>de</strong> façon convaincante que,<br />

malgré la discrétion <strong>de</strong> cette présence du mythe, Le Rivage <strong>de</strong>s Syrtes apparaît bel et bien<br />

comme une réécriture particulièrement riche du mythe <strong>de</strong> <strong>Perceval</strong>, même si aucun indice<br />

explicite ne permet <strong>de</strong> prouver cet intertexte.<br />

10. <strong>En</strong>gendrer du récit<br />

D’un point <strong>de</strong> vue théorique, un tel exemple illustre à merveille le caractère <strong>de</strong> « matrice<br />

narrative » que Durand attribue au mythe. Dans le <strong>de</strong>venir historique du mythe <strong>de</strong> <strong>Perceval</strong>,<br />

on a pu noter que les textes médiévaux avaient perdu, au fil <strong>de</strong>s siècles, cette capacité à<br />

fonctionner comme matrice : tout au plus étaient-ils, du temps <strong>de</strong> la Bibliothèque Universelle<br />

<strong>de</strong>s Romans ou <strong>de</strong> Creuzé <strong>de</strong> Lesser, une texture narrative propre à stimuler l’envie <strong>de</strong><br />

raconter, mais ce n’est qu’après la renaissance du mythe orchestrée par Wagner que cette<br />

matière re<strong>de</strong>vient véritablement un creuset où les écrivains pourront à nouveau puiser.<br />

A l’évi<strong>de</strong>nce, ce n’est pas seulement pour <strong>de</strong>s questions d’affinités avec tel ou tel modèle<br />

symbolique que le mythe <strong>de</strong> <strong>Perceval</strong> fait son retour sur la scène <strong>de</strong>s arts après Wagner : la<br />

structure <strong>de</strong>nse exhumée par la Verdichtung wagnérienne réinjecte le mythe dans l’histoire <strong>de</strong><br />

<strong>Perceval</strong>, ramenant celle-ci à une « forme simple » (comme dirait Jolles) propre à engendrer à<br />

nouveau du récit. Et c’est cette forme simple qui fécon<strong>de</strong> l’imaginaire gracquien, pour en faire<br />

naître les textes que nous venons d’observer.<br />

La notion durandienne <strong>de</strong> « matrice narrative », tout comme l’idée <strong>de</strong> « rencontre » suggérée<br />

précé<strong>de</strong>mment, évoque une métaphore <strong>de</strong> fécondation que nous trouvions déjà en germe tout<br />

au début du texte <strong>de</strong> Chrétien, lorsque l’auteur se présentait comme celui qui « semme et fait<br />

semence » (v. 7). Suivant le fil <strong>de</strong> cette métaphore, Sébastien Douchet présente les quatre<br />

continuations comme autant <strong>de</strong> branches entées sur l’arbre planté par Chrétien, et il insiste en<br />

particulier sur un point :<br />

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