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En quête de Perceval - Université Paris-Sorbonne

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Kundry tient son rang parmi les femmes fatales « fin <strong>de</strong> siècle », tout en offrant la complexité<br />

d’une figure qui oscille entre une aspiration sensuelle et une ar<strong>de</strong>ur pénitente à servir ; les<br />

filles-fleurs et le jardin empoisonné <strong>de</strong> Klingsor, ce mage châtré, sont autant d’éléments qui<br />

rejoignent ou conforment (probablement l’un et l’autre) l’imaginaire déca<strong>de</strong>nt.<br />

D’autre part, la spiritualité syncrétique et le réinvestissement fort <strong>de</strong> certains signes <strong>de</strong> la foi<br />

s’inscrivent parfaitement dans le mysticisme ésotérisant qui caractérise également ces années.<br />

Cette dimension spirituelle, nous l’avons vu, ne se limite pourtant pas à un contenu, et<br />

Parsifal est aussi une œuvre fondamentale pour les symbolistes dans la mesure où elle pose<br />

les bases d’un nouveau rapport <strong>de</strong> l’œuvre au public et d’une forme d’« art ré<strong>de</strong>mpteur ».<br />

Mais sans doute fallait-il laisser aux hommes <strong>de</strong> plume comme aux musiciens quelques<br />

années pour digérer cette première déferlante wagnérienne. Si nous avons pu déceler chez<br />

Verlaine quelque chose qui est <strong>de</strong> l’ordre d’une relecture du mythe, ce cas reste isolé dans les<br />

textes immédiatement suscités par la création <strong>de</strong> Parsifal. Et encore, la relecture en question,<br />

si l’interprétation que j’ai proposée a quelque valeur, est plutôt le fait d’une conjonction<br />

fortuite <strong>de</strong> la thématique parsifalienne avec un engouement <strong>de</strong> Verlaine pour le sacrement <strong>de</strong><br />

l’eucharistie. Il n’y a là nul geste <strong>de</strong> réécriture ou nulle perspective <strong>de</strong> détournement ou <strong>de</strong><br />

prolongation du mythe, mais plutôt un investissement différent <strong>de</strong>s éléments proposés par<br />

Wagner, une perturbation imperceptible <strong>de</strong> leur rapport. Toutes proportions gardées, on<br />

pourrait comparer le sonnet <strong>de</strong> Verlaine à cette gravure que Gracq décrit dans Au château<br />

d’Argol, qui paraît une simple illustration <strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnière scène <strong>de</strong> Parsifal, mais révèle à l’œil<br />

attentif la « hiérarchie en tous points insolite que la composition <strong>de</strong> la scène finissait par<br />

imposer au spectateur » 433 (cf. ci-<strong>de</strong>ssous p. 403).<br />

Pour le reste <strong>de</strong>s textes, il semble que l’emprise <strong>de</strong> Wagner sur le mythe soit encore trop forte<br />

pour qu’il soit possible <strong>de</strong> parler <strong>de</strong> Parsifal dans <strong>de</strong>s termes différents, et les reprises <strong>de</strong> ce<br />

mythe dans les <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rnières déca<strong>de</strong>s du XIXème siècle se présentent surtout comme <strong>de</strong>s<br />

variations sur quelques motifs wagnériens.<br />

La « continuation » semble être le meilleur moyen <strong>de</strong> sortir <strong>de</strong>s traces tout en les poursuivant :<br />

c’est l’option retenue, nous l’avons vu, par Péladan pour La Pâque <strong>de</strong> Parsifal. Dans le<br />

domaine germanique, on peut signaler que Houston Stewart Chamberlain, qui était aussi un<br />

proche <strong>de</strong> Dujardin et un contributeur régulier <strong>de</strong> la Revue wagnérienne, avait déjà entrepris<br />

une telle démarche en inscrivant <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> ses Parsifalmärchen (1892-4) respectivement dans<br />

433 JULIEN GRACQ, Au château d'Argol, <strong>Paris</strong>: José Corti, 1945 [1938], p. 163.<br />

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