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En quête de Perceval - Université Paris-Sorbonne

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son instinct, puis la compassion qui s’éveille en lui et gui<strong>de</strong> ses pas, mais dont on ne peut pas<br />

dire qu’il l’ait conquise <strong>de</strong> haute lutte. Au contraire, ce sont bel et bien Amfortas et Kundry<br />

qui lui offrent cette compassion en lui permettant <strong>de</strong> réaliser ce qui s’est passé entre eux et<br />

d’interpréter dans sa pleine signification la blessure d’Amfortas. Il n’est donc nul besoin<br />

d’extrapoler pour poser que chez Wagner, la capacité ré<strong>de</strong>mptrice que Parsifal possè<strong>de</strong>, par<br />

nature, dans son cœur <strong>de</strong> « pur fol », trouve l’occasion <strong>de</strong> se réaliser grâce à la faute<br />

d’Amfortas. Non seulement parce que c’est à la blessure entrevue, et donc à l’antécé<strong>de</strong>nt<br />

fourni par Amfortas, que Parsifal doit <strong>de</strong> n’avoir pas succombé aux charmes <strong>de</strong> Kundry, mais<br />

aussi, plus largement, parce que si Parsifal n’avait pas eu <strong>de</strong> faute à racheter, il serait resté un<br />

homme comme les autres – un peu plus fruste et impulsif, sans doute – et son sort n’aurait<br />

intéressé personne. Felix culpa.<br />

• Révélation et mise à jour<br />

Seulement, ici, les choses ne se passent pas si bien : certes, la faute apparaît comme nécessaire<br />

à ce que la ré<strong>de</strong>mption puisse advenir. Mais ce qu’Albert comprend en observant la gravure,<br />

c’est que ce lien <strong>de</strong> dépendance hiérarchise irrémédiablement les valeurs, et que jamais le<br />

ré<strong>de</strong>mpteur ne pourra payer la <strong>de</strong>tte qu’il a contractée vis-à-vis <strong>de</strong> la faute. La prise <strong>de</strong><br />

conscience d’Albert avait commencé face au sang <strong>de</strong> Hei<strong>de</strong> ; cet autre sang, mythique,<br />

représenté par l’art, confirme le piège.<br />

Il le confirme tout en l’élevant à un <strong>de</strong>gré <strong>de</strong> signification supérieur : à travers le truchement<br />

du mythe, c’est toute une configuration interrelationnelle qui se trouve dédoublée. Si l’analyse<br />

que nous menons présentement s’attache à relever, <strong>de</strong>puis le début du texte, les éléments qui<br />

associent les trois personnages d’Argol aux modèles mythiques qui figurent sur la gravure, il<br />

faut bien avoir en tête que la découverte <strong>de</strong> cette image, à moins <strong>de</strong> vingt pages <strong>de</strong> la fin du<br />

roman, produit pour le lecteur une véritable ouverture interprétative nouvelle. <strong>En</strong> effet, si l’on<br />

excepte l’« avis au lecteur », où les statuts <strong>de</strong> sauveur et <strong>de</strong> damnateur étaient présentés<br />

comme dialectiquement inséparables et mis en lien direct avec le Parsifal <strong>de</strong> Wagner (p. 8),<br />

aucune mention explicite <strong>de</strong> cette matière mythique n’avait affleuré à la surface du récit<br />

jusque-là.<br />

Il est important <strong>de</strong> noter que cette ouverture se joue à un double niveau : d’une part, le lecteur<br />

prend conscience <strong>de</strong>s similitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux matières et peut, dès lors, entreprendre un travail<br />

interprétatif consistant à dégager la pertinence <strong>de</strong> cette superposition. Mais dans le cas<br />

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