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En quête de Perceval - Université Paris-Sorbonne

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D’autres critiques semblent mieux cerner l’importance spécifique que revêt le mythe <strong>de</strong><br />

<strong>Perceval</strong> dans Argol, tout en s’interrogeant sur la nature <strong>de</strong>s associations ad personam que<br />

cette superposition implique. Jean-Louis Leutrat, par exemple, se <strong>de</strong>man<strong>de</strong> qui est qui 682 ;<br />

Pierre Pruvot est plus téméraire et propose rien moins que cinq configurations qui distribuent<br />

différemment les trois personnages d’Argol dans leurs rôles symboliques :<br />

Avant le récit, c’est Albert (Am) qui a subi la séduction d’Herminien (K) alors que<br />

Hei<strong>de</strong> (P) doit encore venir. Lorsque, le soir <strong>de</strong> son arrivée, Hei<strong>de</strong> (K) force Albert<br />

(Am) à « prendre un long baiser », c’est la venue d’Herminien (P) qui constitue la<br />

menace. C’est par force également qu’Herminien (K) exerce sa séduction sur Hei<strong>de</strong><br />

(Am) qui, dérisoire femme-fleur, trouvera en Albert (P) un provisoire salut. Albert le<br />

lui offre en la lavant et en la soignant comme Kundry le fit pour Amfortas, alors<br />

qu’Herminien, par sa disparition, impose l’angoisse <strong>de</strong> son retour. Puis Herminien<br />

(Am) retrouvé blessé, il est guetté, sinon veillé, par Albert (K), tandis que Hei<strong>de</strong> « fuit<br />

obstinément »… 683<br />

Ces constructions tout à fait échevelées me paraissent dignes d’être mentionnées au moins<br />

dans la mesure où elles présentent un excellent exemple <strong>de</strong>s débor<strong>de</strong>ments que peut<br />

provoquer le jeu <strong>de</strong>s associations s’il n’est pas enserré dans un cadre méthodologique ferme.<br />

Le problème, en l’occurrence, porte surtout sur les motivations qui justifient la distribution<br />

<strong>de</strong>s rôles. Dans le premier cas <strong>de</strong> figure, Albert est associé à Amfortas dans la mesure où il a<br />

« subi la séduction » d’Herminien, qui est donc Kundry. Mais d’une part, tout porte à croire<br />

que la relation <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux complices est bivalente (cf. pp. 44-6) ; le fait que la narration soit<br />

faite, dans un premier temps, du point <strong>de</strong> vue d’Albert biaise peut-être légèrement la<br />

présentation <strong>de</strong>s choses, mais rien n’autorise à penser que la « séduction » est « subie » par<br />

Albert plutôt que par Herminien. D’autre part, cette « séduction » n’a strictement rien à voir<br />

avec celle, essentiellement sexualisée, que Kundry a exercée sur Amfortas. <strong>En</strong> outre, Kundry<br />

réitère sa manœuvre <strong>de</strong> séduction à l’égard <strong>de</strong> Parsifal, et ce n’est pas le fait <strong>de</strong> la « subir »,<br />

mais celui d’y cé<strong>de</strong>r ou non qui distingue, à cet égard, Parsifal d’Amfortas. D’habitu<strong>de</strong>, dans<br />

ce genre <strong>de</strong> surinterprétations, c’est soit la logique du texte qui est tiraillée pour être collée sur<br />

celle du mythe soit, plus fréquemment, le contraire ; ici, la superposition tentée force à la fois<br />

la logique du texte et celle du mythe. Et dans cette configuration, tout ce qui fait <strong>de</strong> Hei<strong>de</strong> un<br />

Parsifal, c’est qu’elle « doit encore venir »…<br />

682<br />

JEAN-LOUIS LEUTRAT, "Bref essai sur l’univers humain <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong> Julien Gracq", Cahiers du Sud, no 382<br />

(1965), pp. 276-7.<br />

683<br />

PIERRE PRUVOT, "Eclats acérés", Givre, no 1 (1976, mai), p. 45.<br />

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