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En quête de Perceval - Université Paris-Sorbonne

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communauté donnée. Comme je l’ai dit, cette notion, comparée au critère d’« éclairage<br />

métaphysique » <strong>de</strong> Sellier, présente la double vertu <strong>de</strong> transférer la charge sacrée du mythe<br />

ethno-religieux dans le contexte séculier où se déploie généralement le mythe littéraire, et<br />

d’inscrire dans la définition même <strong>de</strong> l’objet <strong>de</strong>s modalités relatives à son cadre <strong>de</strong> réception.<br />

Ces trois critères ne sauraient pourtant être suffisants, pour la simple raison que, comme je l’ai<br />

déjà suggéré, ils ne nous permettent pas <strong>de</strong> théoriser <strong>de</strong> façon convaincante ce qui distingue le<br />

mythe littéraire du mythe ethno-religieux ; car, pour autant que la « fascination » évoquée par<br />

Dabezies soit réinjectée dans la sphère du sacré et que, consécutivement, la communauté dont<br />

il parle se ritualise, nos trois critères définitoires englobent aussi bien le mythe ethno-religieux<br />

que le mythe littéraire.<br />

• Historicisation<br />

A ces trois critères, il me semble donc fondamental d’en ajouter un quatrième, sur lequel les<br />

réflexions <strong>de</strong> Jauss nous orientent tout naturellement. Il s’agirait alors <strong>de</strong> définir plus<br />

fermement le mythe littéraire comme objet historique. Ce serait alors en tant qu’il est ancré<br />

dans une diachronie que le mythe littéraire apparaît comme tel. Le mythe littéraire s’inscrit<br />

dans une historicité précise, et je dirais même qu’il manifeste une certaine « conscience » <strong>de</strong><br />

son historicité.<br />

Le mythe ethno-religieux se caractérise par une temporalité cyclique, en ce sens qu’elle est<br />

marquée par le retour <strong>de</strong>s occurrences où sa narration se produit – que celle-ci soit liée à un<br />

moment <strong>de</strong> l’année (rites saisonniers, fêtes annuelles, etc.), <strong>de</strong> la vie d’un individu (mariage,<br />

mort…) ou d’un groupe (succession, fondation d’un nouvel espace…). Cette temporalité, en<br />

outre, se trouve comme annulée dans le moment même <strong>de</strong> la narration qui, bien souvent,<br />

s’applique à rabattre sur le présent un « temps mythique » foncièrement déchronologisé. Il n’y<br />

a aucune prise en compte <strong>de</strong> la notion <strong>de</strong> « déjà dit » dans cette forme <strong>de</strong> discours mythique.<br />

Au contraire, le mythe littéraire est le lieu où se rencontrent un discours intemporel (celui du<br />

mythe) et une conscience non seulement <strong>de</strong> ce que le discours en question a déjà été tenu un<br />

certain nombre <strong>de</strong> fois, mais aussi du fait que sa répétition, ici et maintenant, implique <strong>de</strong>s<br />

enjeux particuliers, qui sont d’ordre esthétique (au sens large). L’édifice littéraire dans lequel<br />

prennent place les réécritures d’un mythe se construit pierre par pierre, <strong>de</strong> bas en haut ;<br />

aucune pierre ne saurait être suspendue dans les airs – telle est la loi <strong>de</strong> la gravitation<br />

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