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En quête de Perceval - Université Paris-Sorbonne

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à travers le temps et les gran<strong>de</strong>s lignes <strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong>s représentations. Sans doute est-ce là<br />

entrer dans <strong>de</strong>s réflexions qui manquent <strong>de</strong> nuances, mais il n’en <strong>de</strong>meure pas moins qu’une<br />

certaine constance semble associer l’intérêt pour le mythe <strong>de</strong> <strong>Perceval</strong> à <strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />

doute, tandis que <strong>de</strong>s temps gouvernés par une pensée plus rationnelle, voire plus positiviste,<br />

tendront plutôt à puiser leurs modèles littéraires à d’autres sources. C’est d’ailleurs ce que dit<br />

Yves Bonnefoy dans la préface qu’il donne à La Quête du Graal : « […] au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s siècles<br />

rationalistes un nouvel intérêt s’attache aujourd’hui à la légen<strong>de</strong> et reprend l’examen anxieux<br />

<strong>de</strong> la question qu’elle pose » 500 .<br />

Une catégorisation très large donne à voir comme <strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s « inquiètes » le Moyen Âge, le<br />

début et la fin du XIXème siècle, puis à nouveau la fin du XXème. Nous avons précé<strong>de</strong>mment<br />

isolé chez Creuzé <strong>de</strong> Lesser <strong>de</strong>s éléments qui montraient une tension entre <strong>de</strong>ux lectures <strong>de</strong><br />

l’histoire, dictées respectivement par l’idée <strong>de</strong> progrès (lecture attachée au classicisme <strong>de</strong>s<br />

Lumières) et <strong>de</strong> déclin (lecture qui trouvera un écho favorable dans le premier romantisme).<br />

Sans doute n’est-il pas tout à fait faux <strong>de</strong> supposer que c’est plutôt sous ce <strong>de</strong>rnier type <strong>de</strong><br />

climat intellectuel que le mythe <strong>de</strong> <strong>Perceval</strong> trouve son terrain privilégié. Ce n’est pas un<br />

mythe qui intéresse le Second Empire, mais il fait irruption dans les arts à l’époque du<br />

déca<strong>de</strong>ntisme et du symbolisme. L’inquiétu<strong>de</strong> à coloration métaphysique qui parcourt la<br />

pério<strong>de</strong> <strong>de</strong>s guerres mondiales lui accor<strong>de</strong> une place que lui dénie la positivité <strong>de</strong>s « trente<br />

glorieuses ».<br />

8. Un Parsifal romand<br />

Mais laissons là ces considérations générales, et voyons plutôt comment tout cela se joue dans<br />

les textes.<br />

J’évoquais, comme exemple d’une relecture ancrée socialement, le Parsifal ou le pays<br />

romand <strong>de</strong> Jean Matter. Il s’agit d’une vaste fresque en quatre volumes (mais pourtant<br />

inachevée), dont l’idée <strong>de</strong> base, si l’on en croit les termes <strong>de</strong> la présentation liminaire, est une<br />

sorte d’expérience quasi zolienne qui repose sur trois facteurs principaux : « le milieu, le<br />

bacille, le cobaye ».<br />

Le milieu, c’est le Pays romand. Le bacille, c’est le calvinisme, ou, si l’on préfère, le<br />

moralisme qui en dérive. Pour le cobaye, il ne sera pas difficile à découvrir. Il suffira<br />

500 La Quête du Graal, trad. Albert Béguin et Yves Bonnefoy, <strong>Paris</strong>: Seuil, 1965, p. 20.<br />

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