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Géographie et imaginaire géographique dans les Voyages ...

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palmier est c<strong>et</strong> élément qui renforce la représentation exotique d’un territoire donné. Et c<strong>et</strong>te<br />

« exotisation » particulière, Ju<strong>les</strong> Verne la justifie par la nouveauté, par le caractère récent de<br />

son expédition. Voici ce qu’en dit le narrateur : « Dans la région de l’Orénoque supérieur, si<br />

<strong>les</strong> montagnes ne sont pas boisées jusqu’à leur cime, comme le sont <strong>les</strong> cerros du cours<br />

moyen, <strong>les</strong> forêts se montrent riches en essences variées <strong>et</strong> toutes luxuriantes des produits<br />

d’un sol vierge. […] Ces massifs d’arbres - c’est à noter - étaient formés généralement<br />

d’essences d’une exploitation facile, même pour <strong>les</strong> indigènes. Çà <strong>et</strong> là, des palmiers<br />

d’espèces très diverses, sinon nouvel<strong>les</strong> aux yeux de voyageurs qui avaient remonté le fleuve<br />

depuis Ciudad-Bolivar jusqu’au pic Maunoir, des bananiers, des chapparos, des cobigas, des<br />

calebassiers, des marinas, dont l’écorce sert à fabriquer <strong>les</strong> sacs indigènes » 575 . Un mythe<br />

apparaît d’ailleurs ici, celui de la fertilité des sols vierges, mythe que l’on r<strong>et</strong>rouve à propos<br />

des sols de la Mission de Santa-Juana : « Si le sol de c<strong>et</strong>te contrée possédait une si<br />

merveilleuse fertilité que devaient accroître <strong>les</strong> bonnes méthodes de culture, c’est qu’il était<br />

vierge encore » 576 . Nous y reviendrons plus longuement.<br />

Ju<strong>les</strong> Verne se détache progressivement de sa source principale pour créer, à sa guise,<br />

une végétation luxuriante, tout à fait improbable sur ces territoires du haut Orénoque. Bruno<br />

Manara explique : « Finalement là où Ju<strong>les</strong> Verne rompt sa dépendance de Chaffanjon, c’est<br />

<strong>dans</strong> la dernière partie depuis le chapitre XXIV 577 , lorsque <strong>les</strong> explorateurs remontent<br />

l’<strong>imaginaire</strong> Rio Torrida <strong>et</strong> se dirigent vers la mission idéalisée de Santa-Juana. Dans c<strong>et</strong>te<br />

partie du roman, tout le paysage <strong>et</strong> <strong>les</strong> événements deviennent complètement irréels : aussi<br />

bien la forêt […] que <strong>les</strong> alentours de la mission Santa-Juana elle-même où poussent en<br />

forme de forêt « des bananiers, des platanes <strong>et</strong> des caféiers qui s’abritent à l’ombre de grands<br />

arbres de fleurs rouges » (c’est à dire <strong>les</strong> bucares Erytrina poepigiana, qui ne croissent<br />

certainement pas au sud de l’Orénoque). De la même façon, ni le café ni <strong>les</strong> bananes<br />

(cambures) ne peuvent pousser sous forme sylvestre <strong>dans</strong> le haut Orénoque puisque <strong>les</strong> uns <strong>et</strong><br />

<strong>les</strong> autres ont été amenés d’Afrique <strong>et</strong> d’Asie […] » 578 . À la fin de son article, l’auteur<br />

explique : « Mais à Ju<strong>les</strong> Verne à moins d’avoir une imagination débridée, on ne peut<br />

reprocher de ne pas avoir fidèlement décrit un monde tropical qu’il n’avait jamais vu <strong>et</strong> dont<br />

il n’avait fait qu’entrevoir la réalité à travers le maigre journal de Chaffanjon. Cela eut été<br />

bien différent s’il s’était documenté par exemple du Voyage <strong>dans</strong> <strong>les</strong> régions équinoxia<strong>les</strong><br />

575<br />

Verne Ju<strong>les</strong>. Le Superbe Orénoque, op. cit., p. 486.<br />

576<br />

Ibid., p. 552.<br />

577<br />

Il s’agit en fait du chapitre VII de la Seconde Partie « Le campement du Pic Maunoir ».<br />

578<br />

Manara Bruno. « Le Superbe Orénoque en 80 mondes », op. cit., p. 33.<br />

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