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Géographie et imaginaire géographique dans les Voyages ...

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poursuit sa description <strong>géographique</strong> (hydrographique <strong>et</strong> géomorphologique 614 ). Il reprend<br />

c<strong>et</strong>te théorie géologique développée par Humboldt selon laquelle « toutes <strong>les</strong> immenses<br />

plaines qui se trouvent entre le haut Orénoque <strong>et</strong> <strong>les</strong> Andes de Colombie <strong>et</strong> d’Équateur,<br />

étaient, <strong>dans</strong> des temps géologiques lointains, un lac immense <strong>et</strong> <strong>les</strong> rapides d’Atures <strong>et</strong><br />

Maipures seraient <strong>les</strong> restes d’une ancienne barrière montagneuse qui a finalement cédé<br />

devant la pression des eaux <strong>et</strong> a rendu possible la formation des Llanos <strong>dans</strong> ce qui était<br />

autrefois l’Océan » 615 . Ju<strong>les</strong> Verne reste néanmoins flou concernant la situation <strong>géographique</strong><br />

(« quelques centaines de kilomètres vers le nord <strong>et</strong> le nord-est »). C<strong>et</strong>te incertitude lui fournit<br />

l’occasion d’introduire une rupture <strong>dans</strong> l’espace où pourra se loger ultérieurement<br />

l’<strong>imaginaire</strong> Mission de Santa-Juana. Le décrochage <strong>dans</strong> l’espace se fait par la description de<br />

c<strong>et</strong>te géographie confuse <strong>et</strong> imaginée « où <strong>les</strong> reliefs semblent en désaccord avec <strong>les</strong> logiques<br />

lois de la nature ».<br />

178<br />

Le flou artistique <strong>et</strong> <strong>géographique</strong> est assumé par Ju<strong>les</strong> Verne qui renonce à toute<br />

localisation précise : « perdu à la surface d’une extraordinaire région ». Ju<strong>les</strong> Verne introduit<br />

<strong>dans</strong> le cas présent un autre monde où <strong>les</strong> logiques de la nature ne sont plus respectées<br />

(littéralement, la géologie est elle aussi extraordinaire). La métaphore du désert présentée<br />

précédemment est renforcée par l’évocation de la « cime inviolée » du Mont Roraima : l’idée<br />

de virginité, sur laquelle nous reviendrons, est fondamentale <strong>dans</strong> le processus vernien de<br />

création littéraire <strong>et</strong> <strong>géographique</strong>. Or, « Ici est commis un autre arbitraire <strong>géographique</strong><br />

comme de transporter le Roraima à la Sierra Parima, ce qui équivaudrait à dire que l’île<br />

Margarita est en face de la Guaira. Ceci ne s’explique que par l’imperfection des cartes du<br />

passé <strong>et</strong> par la méconnaissance, quasi-totale jusqu’il y à quelques décennies, d’une grande<br />

partie de la Sierra Parima <strong>et</strong> de toute la zone intermédiaire […] » 616 .<br />

Outre le mythique Eldorado, Ju<strong>les</strong> Verne convoque <strong>dans</strong> son récit un autre élément<br />

mythique, le Mont Roraima « dont Im Thurn <strong>et</strong> Perkin devaient, quelques années plus tard,<br />

fouler la cime inviolée jusqu’alors ». La référence à Im Thurn <strong>et</strong> Harry Perkins est plus<br />

importante qui il y paraît, car Ju<strong>les</strong> Verne renforce la dimension mythique de son récit en<br />

évoquant l’expédition de 1884 qu’il connaissait parfaitement, ayant rédigé son roman en 1894<br />

: « Le Mont Roraima a été rendu célèbre en 1912 quand Sir Arthur Conan-Doyle publie son<br />

roman de fiction intitulé Le Monde Perdu. Il y décrit l’ascension du Mont Roraima comme<br />

614 Ju<strong>les</strong> Verne s’inspire ici directement des pages 110 à 112 du tome XVIII de la N.G.U. d’Élisée Reclus qui luimême<br />

s’inspire directement du voyage de Chaffanjon <strong>et</strong> des travaux de Humboldt.<br />

615 Manara Bruno. « Le Superbe Orénoque en 80 mondes », op. cit., p. 24<br />

616 Ibid., p. 25.

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