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Géographie et imaginaire géographique dans les Voyages ...

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secondaire), alors que <strong>dans</strong> la contemplation, on peut dire de l’observateur qu’il se fond en<br />

elle. Victor Hugo, <strong>dans</strong> son recueil de poésies Les Contemplations (1856), voit <strong>dans</strong> la<br />

contemplation une porte ouverte vers le bonheur, l’amour, le souvenir. Chateaubriand, <strong>dans</strong><br />

un conte pour enfants, résume la contemplation à l’aide des trois verbes : regarder, aimer,<br />

ressembler. Si l’admiration caractérise surtout Rousseau 206 , la contemplation se rapporte plus<br />

spécifiquement à Hugo <strong>et</strong> Chateaubriand, deux auteurs que Ju<strong>les</strong> Verne admirait, comme nous<br />

l’avons noté précédemment. Ju<strong>les</strong> Verne se rapproche ainsi plus souvent des seconds que du<br />

premier : « Toutes ces merveil<strong>les</strong>, je <strong>les</strong> contemplais en silence. […] Après une heure passée<br />

<strong>dans</strong> la contemplation de ce merveilleux spectacle, nous reprîmes le chemin de la grève pour<br />

regagner la grotte, <strong>et</strong> ce fut sous l’empire des plus étranges pensées que je m’endormis d’un<br />

profond sommeil » 207 .<br />

Le verbe contempler date du XIII ème siècle <strong>et</strong> provient du latin contemplari (regarder<br />

attentivement). Il dérive de cum (particule d’intensité) <strong>et</strong> de templum qui désigne, au sens<br />

premier du terme, l’espace sacré que la vue embrasse (l’espace carré délimité <strong>dans</strong> le ciel <strong>et</strong><br />

sur la terre où se disent <strong>les</strong> augures). Contempler veut dire, selon l’étymologie, considérer<br />

attentivement par la pensée ce qui <strong>dans</strong> le visible suscite joie <strong>et</strong> admiration. Celui qui<br />

contemple voit ce qu’il contemple comme relevant à la fois de la terre <strong>et</strong> du ciel, <strong>et</strong> il le reçoit<br />

comme un message des dieux. La contemplation apparaît comme une autre médiation<br />

possible entre l’homme <strong>et</strong> la nature, <strong>et</strong> entre l’homme <strong>et</strong> Dieu. Contempler la nature, c’est<br />

dialoguer avec elle, c’est communier avec son milieu. Mais si la nature est parfaite (pour Ju<strong>les</strong><br />

Verne), la nature humaine, au contraire, peut se révéler imparfaite, faillible. L’homme est un<br />

être de nature qui semble parfois trop éloigné de ses sources 208 . La solitude exprime <strong>les</strong><br />

imperfections d’un homme qui pour l’auteur ne peut s’épanouir qu’avec ses semblab<strong>les</strong>.<br />

1 - Une nature humaine imparfaite : l’homme seul ou le dépérissement de l’être<br />

Un exemple illustre la solitude de l’homme. C<strong>et</strong>te dernière, ici subie <strong>et</strong> vécue <strong>dans</strong> une<br />

nature sauvage, conduit inexorablement l’homme vers un dépérissement de l’être : l’homme<br />

régresse. C<strong>et</strong>te solitude peut être réelle <strong>et</strong>/ou psychologique : l’abandon physique d’Ayrton<br />

<strong>dans</strong> Les Enfants du capitaine Grant le transforme en un sauvage qui revient à la civilisation<br />

lors de sa récupération par la société <strong>dans</strong> L’Île Mystérieuse : « Mais sans doute le ciel ne le<br />

206 « Ce n’est pas ce Yankee qui aurait pu dire ce que Jean-Jacques Rousseau dit de lui-même au début des<br />

Confessions : « Je forme une entreprise qui n’eut jamais d’exemple <strong>et</strong> qui n’aura point d’imitateurs » ». Verne<br />

Ju<strong>les</strong>. Le Village aérien (1901). Chapitre VIII.<br />

207 Verne Ju<strong>les</strong>. Voyage au centre de la Terre (1867). Chapitre XXX.<br />

208 La réalité est cependant plus complexe. Voir à ce titre : Morin Edgar. Le paradigme perdu : la nature<br />

humaine. Paris : Points Seuil, 1979, 246 p.<br />

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