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Géographie et imaginaire géographique dans les Voyages ...

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maïs, qui produit quatre récoltes annuel<strong>les</strong> avec près de quatre cents grains pour le seul<br />

grain dont l’épi a germé » 626 .<br />

Dans ce paragraphe, Ju<strong>les</strong> Verne présente de nouveau la situation <strong>géographique</strong>, mais<br />

en se concentrant maintenant plus particulièrement sur la Mission de Santa-Juana. Celle-ci est<br />

située « à une cinquantaine de kilomètres <strong>dans</strong> le nord-est des sources du fleuve <strong>et</strong> de<br />

l’embouchure du rio Torrida ». L’auteur associe ici habilement une donnée réelle (« <strong>les</strong><br />

sources du fleuves ») à une donnée purement <strong>imaginaire</strong> (le « rio Torrida »). Ce registre<br />

descriptif perm<strong>et</strong> d’inscrire la Mission de Santa-Juana à mi-chemin entre le réel <strong>et</strong><br />

l’<strong>imaginaire</strong>, entre deux récits, celui de Chaffanjon <strong>et</strong> celui de Verne, entre deux sources,<br />

cel<strong>les</strong> de l’<strong>imaginaire</strong> Rio Torrida <strong>et</strong> cel<strong>les</strong> du réel fleuve Orénoque. C<strong>et</strong>te inscription, c<strong>et</strong>te<br />

localisation de la Mission de Santa-Juana entre deux mondes, deux temporalités bien définies<br />

participe de la géographie extraordinaire que Ju<strong>les</strong> Verne développe <strong>dans</strong> ses romans.<br />

Après avoir évoqué de nombreux mythes, la transformation du chaos en cosmos, après<br />

s’être inscrit <strong>dans</strong> une rhétorique biblique, Ju<strong>les</strong> Verne développe un merveilleux<br />

<strong>géographique</strong> qui articule le récit poético-mythique (<strong>et</strong> biblique) au récit merveilleux exotique.<br />

Le romancier décrit ici un véritable jardin d’Éden (« un sol d’une étonnante fertilité où<br />

croissaient <strong>les</strong> plus uti<strong>les</strong> essences »), prolongeant son allégorie biblique. Le merveilleux<br />

(botanique <strong>et</strong> agronomique) qu’il nous décrit est exotique (« où croissaient <strong>les</strong> plus uti<strong>les</strong><br />

essences […] des bananiers, des platanes, des cafiers ou caféiers […] ») <strong>et</strong> illustre une<br />

biodiversité pourtant impossible <strong>dans</strong> c<strong>et</strong>te portion du Venezuela 627 . Procédé familier à<br />

l’auteur, la longue énumération des différentes essences présentes autour de la Mission de<br />

Santa-Juana doit convaincre le lecteur de c<strong>et</strong>te invraisemblable diversité bio-<strong>géographique</strong>.<br />

L’éloignement, l’exotisme, la méconnaissance du territoire décrit perm<strong>et</strong>tent de<br />

justifier l’invraisemblable, l’extraordinaire : « L’<strong>imaginaire</strong> du voyage trouve donc sa<br />

meilleure expression poétique <strong>dans</strong> <strong>les</strong> récits de voyage authentiques grâce à l’exotisme <strong>et</strong> à<br />

la curiosité qui forment un nouveau merveilleux exotique d’origine divine <strong>et</strong> biblique. Rien<br />

d’étonnant alors que certains voyageurs rêvent de pousser leur exploration des divinités de la<br />

nature jusqu’à rechercher la nature divine par excellence, le Jardin d’Éden. Parmi tant de<br />

merveil<strong>les</strong> mises à jour par <strong>les</strong> voyages vers l’inconnu, <strong>et</strong> après l’inattendue trouvaille d’un<br />

nouveau <strong>et</strong> vaste continent, pourquoi ne pas envisager la découverte du paradis ? » 628 .<br />

626 Ibid., p. 551-552.<br />

627 Manara Bruno. « Le Superbe Orénoque en 80 mondes », op. cit., p. 31 à 34.<br />

628 Requemora Sylvie. « Un merveilleux exotique ? ». In : Actes du 33 ème congrès annuel de la North American<br />

Soci<strong>et</strong>y of Seventeenth-Century French Literature, Gunter Narr Verlag Éditeur, 2001. p. 253-265.<br />

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