17.07.2013 Views

Géographie et imaginaire géographique dans les Voyages ...

Géographie et imaginaire géographique dans les Voyages ...

Géographie et imaginaire géographique dans les Voyages ...

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

contre-nefs d’une cathédrale gothique. […] Un mille plus loin, notre tête se courbait sous <strong>les</strong><br />

cintres surbaissés du style roman, <strong>et</strong> de gros piliers engagés <strong>dans</strong> le massif pliaient sous la<br />

r<strong>et</strong>ombée des voûtes » 186 . L’homme aussi peut construire des édifices qui méritent<br />

l’admiration : « enfin, tout ce que la nature peut réunir de merveil<strong>les</strong> pour <strong>les</strong> yeux, sans que<br />

la main de l’homme se trahisse en ses aménagements, telle était la résidence d’été de la riche<br />

famille » 187 .<br />

56<br />

Même lorsque <strong>les</strong> personnages de Ju<strong>les</strong> Verne évoluent <strong>dans</strong> une dimension<br />

fantastique, ce dernier sait rappeler à l’ordre ceux qui abusent de leurs pouvoirs : « Sachez<br />

aussi que ces diverses métamorphoses s’opéraient par l’intermédiaire des génies. Les bons<br />

génies faisaient monter, <strong>les</strong> mauvais faisaient descendre, <strong>et</strong> si ces derniers abusaient parfois<br />

de leur puissance, le Créateur pouvait <strong>les</strong> en priver pour un certain temps » 188 . L’équilibre à<br />

respecter est double. D’une part l’homme doit respecter son environnement ; d’autre part il ne<br />

doit pas abuser de l’avantage que lui donnent <strong>les</strong> derniers progrès en matière de sciences <strong>et</strong><br />

techniques. La science doit être un outil, jamais une fin, <strong>et</strong> c<strong>et</strong>te dernière ne doit en aucun cas<br />

servir celui qui veut se venger, celui qui veut dépasser <strong>les</strong> limites 189 .<br />

Roland Barthes résume ainsi l’univers de Ju<strong>les</strong> Verne : « Verne a construit une sorte<br />

de cosmogonie fermée sur elle-même, qui a ses catégories propres, son temps, son espace, sa<br />

plénitude, <strong>et</strong> même son principe existentiel. Ce principe me paraît être le geste continu de<br />

l’enfermement. L’imagination du voyage correspond chez Verne a une exploration de la<br />

clôture, <strong>et</strong> l’accord de Verne <strong>et</strong> de l’enfance ne vient pas d’une mystique banale de<br />

l’aventure, mais au contraire d’un bonheur commun du fini […] : s’enclore <strong>et</strong> s’installer, tel<br />

est le rêve existentiel de l’enfance <strong>et</strong> de Verne » 190 .<br />

Indiscutablement, l’idée de nature chez Ju<strong>les</strong> Verne est liée à la croyance en<br />

l’existence d’un être suprême, d’un Créateur, de Dieu. Si la folie (douce, mesurée) peut servir<br />

de moteur à l’exploration de ces limites, le franchissement de ces dernières constitue un<br />

véritable casus belli à l’encontre du Créateur (« de toutes choses », comme dit Ju<strong>les</strong> Verne<br />

<strong>dans</strong> Le Pays des fourrures). Ce Créateur est omniscient, omniprésent, il conjugue l’espace <strong>et</strong><br />

186<br />

Verne Ju<strong>les</strong>. Voyage au centre de la Terre (1864). Chapitre XIX.<br />

187<br />

Verne Ju<strong>les</strong>. Le Rayon vert (1882). Chapitre II.<br />

188<br />

Verne Ju<strong>les</strong>. Aventures de la famille Raton. In : Contes <strong>et</strong> nouvel<strong>les</strong> de Ju<strong>les</strong> Verne. Rennes : Éditions Ouest-<br />

France, 2000. Chapitre II. Ju<strong>les</strong> Verne évoque ici la métempsychose, autre manifestation d’une nature facétieuse<br />

: « Quant à Ben-Zouf, la métempsycose une fois admise, il devait avoir été autruche <strong>dans</strong> une existence<br />

antérieure ; il en avait conservé un de ces viscères phénoménaux, aux puissants sucs gastriques, qui digèrent des<br />

cailloux comme des blancs de poul<strong>et</strong>. » In : Hector Servadac (1877). Chapitre III, Première Partie.<br />

189<br />

Verne Ju<strong>les</strong>. Face au drapeau (1896). Chapitre XIX ; Vingt mille lieues sous <strong>les</strong> mers (1869-70), Chapitre<br />

XXI, Seconde Partie.<br />

190<br />

Barthes Roland. Mythologies, op. cit., p. 75.

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!