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Géographie et imaginaire géographique dans les Voyages ...

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s’étendre indéfiniment <strong>dans</strong> ces « savanes de l’Orénoque [qui] sont pour ainsi dire sans<br />

limites ». Par c<strong>et</strong>te création <strong>imaginaire</strong>, Ju<strong>les</strong> Verne compose un véritable « point suprême »<br />

où « l’âge d’or » 638 n’est pas sans rappeler le puissant mythe de l’Eldorado : « [...] le point<br />

suprême devient le lieu où l’œuvre <strong>dans</strong> son dialogue avec elle-même devient le plus efficace<br />

possible, lorsque sa forme perm<strong>et</strong> à toutes ses parties de dialoguer non seulement entre el<strong>les</strong><br />

mais avec le monde dont elle cherche à rendre compte <strong>dans</strong> une démarche qui s’efforce d’être<br />

totalisante, lorsque <strong>les</strong> régions <strong>et</strong> <strong>les</strong> époques, mais aussi <strong>les</strong> mythes <strong>et</strong> <strong>les</strong> cultures évoqués<br />

entrent en résonance. Ainsi faut-il comprendre la notion de point suprême chez Butor non pas<br />

comme une réduction finale du multiple à l’unité, mais bien comme le point où la multiplicité<br />

en tant que telle devient harmonie plénière <strong>et</strong> concertante » 639 .<br />

190<br />

Dans c<strong>et</strong>te perspective, il est intéressant de remarquer comment la fertilité des sols que<br />

Ju<strong>les</strong> Verne évoque introduit (symboliquement bien sûr) le développement extraordinaire de<br />

c<strong>et</strong>te p<strong>et</strong>ite mission où affluent régulièrement de nombreux Indiens. Les hommes vivent en<br />

harmonie, en symbiose avec c<strong>et</strong>te terre fertile : la terre enfante littéralement l’homme <strong>et</strong> lui<br />

perm<strong>et</strong> de s’accomplir.<br />

Dans ce chapitre, Ju<strong>les</strong> Verne m<strong>et</strong> en scène une véritable poétique de l’espace, à savoir<br />

la création <strong>et</strong> la transformation d’un espace <strong>géographique</strong>. Mais c<strong>et</strong> espace ne se limite pas au<br />

seul territoire habitable ; il est, comme nous l’avons souligné précédemment, un « point<br />

suprême ». Aux marges de l’écoumène, l’auteur crée son propre espace, son propre monde.<br />

C’est ainsi qu’il revient aux sources pour mieux s’en détacher. Par ce voyage initiatique,<br />

l’héroïne peut r<strong>et</strong>rouver son père <strong>et</strong> le « tuer » symboliquement, alors qu’elle le pensait déjà<br />

mort. Littéralement, c<strong>et</strong>te résurrection accomplit un miracle : Jeanne devient une femme <strong>et</strong><br />

peut désormais épouser Jacques Helloch avec le consentement d’un père qui est également<br />

Père (Espérante) : « […] le Père Esperante donnerait aux nouveaux époux la bénédiction<br />

nuptiale, qui serait aussi la bénédiction paternelle » 640 .<br />

Le Superbe Orénoque est ainsi le récit de trois expéditions qui remontent le fleuve<br />

éponyme afin d’en déterminer <strong>les</strong> véritab<strong>les</strong> sources. Si <strong>les</strong> deux premières expéditions sont<br />

<strong>géographique</strong>s, la troisième apparaît avant tout romanesque. Pourtant elle repose, comme<br />

nous l’avons montré, sur une solide trame <strong>géographique</strong> qui conjugue <strong>imaginaire</strong>, symbole <strong>et</strong><br />

mythe. Or, le point de convergence de ces trois expéditions est la Mission de Santa-Juana :<br />

638<br />

Ibid., p. 60.<br />

639<br />

Giraudo Lucien. Michel Butor. Le dialogue avec <strong>les</strong> arts. Villeneuve d’Ascq : Presses Universitaires du<br />

Septentrion, 2006. p. 62<br />

640<br />

Verne Ju<strong>les</strong>. Le Superbe Orénoque (1898). Chapitre XIII, Seconde Partie.

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