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d’une autre cité qui, pour être plus vaste, n’en était pas moins<br />

désolée : celle de Haleb, ou Alep, comme l’orthographient les<br />

Occidentaux. Nous y passâmes la nuit dans un caravansérail où<br />

le tenancier nous conseilla d’échanger nos vêtements vénitiens<br />

contre le costume léger des Arabes bien mieux adapté aux<br />

conditions de notre voyage. En quittant Alep, nous arborions<br />

désormais la parfaite panoplie du caravanier levantin, du<br />

keffieh ceignant la tête aux amples draperies couvrant les<br />

jambes. Il faut reconnaître que ce vêtement est<br />

incomparablement plus pratique pour voyager à cheval que la<br />

tunique et les chausses vénitiennes, plus moulantes. Et, au<br />

moins de loin, nous ressemblions vraiment à trois de ces<br />

nomades arabes qui s’appellent eux-mêmes les arpenteurs du<br />

vide, ou bedawin.<br />

La plupart des caravansérails de la région étant tenus par<br />

des Arabes, j’assimilai bien sûr un grand nombre de mots de<br />

leur langue. Mais ces commerçants pratiquaient aussi le langage<br />

universel de l’Asie, le farsi, et nous nous rapprochions chaque<br />

jour de la Perse dont c’est l’idiome originel. Aussi, dans le but de<br />

m’initier plus rapidement à cette langue, mon père et mon oncle<br />

s’efforcèrent dès lors de communiquer dans ce qu’ils<br />

connaissaient de farsi, au lieu de notre dialecte vénitien ou du<br />

sabir français. Et pour le coup, j’appris. Je trouvai même le farsi<br />

beaucoup moins compliqué que bien des langues auxquelles j’ai<br />

dû me confronter par la suite. Il faut croire en outre que les<br />

jeunes gens ont plus de facilité dans l’acquisition que leurs<br />

aînés, car je ne fus pas long à maîtriser le farsi bien mieux que<br />

mon oncle et mon père n’avaient réussi à le faire.<br />

Un peu à l’est d’Alep, nous atteignîmes le fleuve suivant, le<br />

Furat, plus connu sous le nom d’Euphrate, que la Genèse<br />

mentionne comme l’un des quatre cours d’eau arrosant le jardin<br />

d’Eden. Loin de moi l’idée de vouloir contredire la Bible, mais<br />

sur toute la longueur de ce fleuve je ne vis pas grand-chose qui<br />

puisse mériter le nom de jardin. À l’endroit où nous le<br />

rejoignîmes pour en suivre le cours en direction du sud-est, ses<br />

eaux, contrairement à celles de l’Oronte, ne coulaient pas dans<br />

une vallée riante. Elles se contentaient d’errer de façon<br />

vagabonde au milieu d’une contrée sans relief, une immense<br />

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