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signalée l’esclave. Il y avait là un comptoir encombré de piles de<br />

vêtements d’un tissu qui semblait assez lourd, sur lequel brûlait,<br />

dans un bol de pierre, une mèche qui trempait dans de l’huile de<br />

naphte. La flamme brillante éclairait le regard matois d’un vieux<br />

Persan à la barbe teinte au henné.<br />

— J’aimerais voir vos articles les plus doux, déclarai-je,<br />

comme m’avait conseillé de le faire Narine.<br />

— Pièce de gauche, répliqua sans broncher le gebr,<br />

désignant de son menton barbichu un rideau de perles situé au<br />

fond de sa boutique. C’est un dirham !<br />

— C’est que... j’aimerais vraiment quelque chose de bien,<br />

spécifiai-je.<br />

Il émit un sifflement de mépris.<br />

— Si vous me montrez une seule belle fille parmi les<br />

créatures rustiques de l’endroit, c’est moi qui vous paierai. Ne<br />

vous plaignez pas : déjà, elles sont saines. Un dirham.<br />

— Après tout, vous avez raison : qu’importe l’eau, pourvu<br />

qu’elle éteigne le feu ! répliquai-je, résigné.<br />

Le vieil homme me toisa du regard comme si je venais de lui<br />

cracher dessus. Je compris soudain que ce n’était peut-être pas<br />

la meilleure chose à dire à un adorateur du dieu du feu... Je me<br />

hâtai de poser ma pièce sur le comptoir et écartai le rideau de<br />

perles qui m’offrit le passage en tintinnabulant.<br />

Un peu partout dans la pièce étaient pendues des branches<br />

de caroubier qui distillaient leur doux arôme. Pour tout<br />

mobilier, il y avait là un brasero au charbon de bois et un<br />

charpai, un lit rudimentaire fait de cordes entrelacées sur une<br />

armature de bois. La fille n’était pas plus avenante de visage que<br />

la seule autre femme dont j’avais auparavant payé les faveurs, la<br />

grosse Margarita des docks. Celle-ci était un pur produit des<br />

tribus locales et ne maîtrisait que la langue dominante, le<br />

pashtoun, avec à la rigueur quelques vagues mots, très<br />

laborieux, de farsi commercial. Si elle me donna son nom, je ne<br />

le compris pas, car le pashtoun est une langue qui consiste à<br />

répéter à toute vitesse des sons tous similaires tout en se raclant<br />

la gorge, en crachant et en éternuant.<br />

Ce qui était cependant vrai, dans ce que m’avait annoncé le<br />

gebr, c’est qu’elle était propre, plus en tout cas que l’avait été<br />

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