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pourpre, sauf lorsqu’un toit de nuages gris laineux et humides<br />

venait lessiver la neige et la faire fondre en filets argentés.<br />

Le sol était partout inégal, encombré d’un fouillis de<br />

cailloux, de rochers et de talus qu’il nous fallait franchir, non<br />

sans contorsions parfois, ou contourner avec la plus grande<br />

précaution. Hormis ces inégalités de terrain, notre ascension,<br />

pourtant continue, demeurait insensible, et nous aurions<br />

presque pu nous croire encore en plaine. Chaque soir, en effet,<br />

lorsque nous nous arrêtions pour établir notre campement, les<br />

montagnes se dressaient devant nous, toujours aussi hautes et<br />

altières que la veille. Mais c’était juste parce que ces dernières<br />

ne cessaient de s’élever, au fil de notre ascension de cette vallée<br />

en pente. Cela donnait la même impression que lorsque vous<br />

grimpez un escalier et que la rampe reste toujours à la hauteur<br />

de votre main : si vous ne pensez pas à jeter un coup d’œil vers<br />

le bas, il vous est impossible de vous rendre compte que tout<br />

s’enfonce sous vos pas et que ce que vous avez gravi s’éloigne<br />

vraiment.<br />

Nous avions néanmoins plusieurs moyens d’évaluer notre<br />

prise d’altitude. Le comportement de nos chevaux était par<br />

exemple éloquent. Nous autres bipèdes pouvions fort bien ne<br />

pas voir, forcés de descendre de cheval pour cheminer sur<br />

quelque tronçon accidenté, que chaque pas en avant était plus<br />

haut que le précédent, mais nos bêtes, n’ayant pas les antérieurs<br />

à la hauteur de leurs membres postérieurs, ressentaient bien la<br />

dénivellation. Aussi, les chevaux, particulièrement futés,<br />

ajoutaient subtilement une certaine lourdeur à leur lente et<br />

pénible marche afin que nous ne les pressions pas trop.<br />

Autre indicateur de notre ascension, la rivière qui caracolait<br />

le long de la vallée. Cet Ab-e-Panj, nous avait-on dit, est l’un des<br />

contributeurs de l’Oxus, ce large fleuve qu’Alexandre a franchi<br />

tant et tant de fois, et dont il dépeint le cours dans son Roman<br />

comme ample, lent et tranquille. Cette description<br />

correspondait sans doute à des zones plus occidentales que<br />

celles où nous étions parvenus. Le cours d’eau que nous<br />

suivions n’était désormais ni large ni profond, mais courait dans<br />

la vallée telle une blanche cavalcade de chevaux sauvages,<br />

agitant mille queues et crinières étincelantes.<br />

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