L'école ou la guerre civile - Site de Philippe Meirieu
L'école ou la guerre civile - Site de Philippe Meirieu
L'école ou la guerre civile - Site de Philippe Meirieu
You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
<strong>Philippe</strong> <strong>Meirieu</strong> - Marc Guiraud L’école contre <strong>la</strong> <strong>guerre</strong> <strong>civile</strong><br />
Certes, l'école ne peut pas panser t<strong>ou</strong>tes les blessures <strong>de</strong> <strong>la</strong> société. Elle<br />
n'a sans d<strong>ou</strong>te pas les moyens <strong>de</strong> faire réussir <strong>la</strong> totalité <strong>de</strong>s élèves. Elle ne<br />
peut pas non plus <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r l’impossible à ses enseignants. Mais ce<strong>la</strong><br />
n'interdit ni <strong>de</strong> prendre <strong>de</strong>s risques ni <strong>de</strong> faire confiance. Parce que <strong>la</strong><br />
confiance est finalement <strong>la</strong> seule attitu<strong>de</strong> réaliste, <strong>la</strong> seule qui n'obture pas<br />
définitivement l'avenir, ne condamne pas à une tragique reproduction du<br />
passé. Seul un regard optimiste sur les potentialités <strong>de</strong> l’autre protège <strong>de</strong>s<br />
tentations démiurgiques. Aucun enseignant n'est Dieu... aucun chef<br />
d'établissement non plus ! Ni l’un ni l’autre ne lisent dans le futur. S'ils<br />
prennent <strong>de</strong>s risques avec un élève dont personne n'espère plus rien, c'est<br />
parce qu'ils connaissent <strong>la</strong> mo<strong>de</strong>stie nécessaire <strong>de</strong> <strong>la</strong> mission d’éducateur.<br />
Le vrai maître parie t<strong>ou</strong>j<strong>ou</strong>rs sur ce que l'homme a <strong>de</strong> meilleur et s’efforce<br />
<strong>de</strong> le révéler... Comme l’a écrit Paul C<strong>la</strong>u<strong>de</strong>l en s<strong>ou</strong>s-titre du S<strong>ou</strong>lier <strong>de</strong><br />
satin, dans le registre <strong>de</strong> l'humain, « le pire n'est jamais sûr » et il ne faut<br />
jamais cesser <strong>de</strong> n<strong>ou</strong>s en convaincre. Zo<strong>la</strong> <strong>ou</strong> Einstein étaient <strong>de</strong>s élèves<br />
médiocres dont les enseignants n’auraient pas donné cher <strong>de</strong> <strong>la</strong> carrière<br />
sco<strong>la</strong>ire. N<strong>ou</strong>s connaissons t<strong>ou</strong>s, aut<strong>ou</strong>r <strong>de</strong> n<strong>ou</strong>s, <strong>de</strong>s personnes qui ont<br />
réussi <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s supérieures avant <strong>de</strong> s’épan<strong>ou</strong>ir dans un métier<br />
passionnant, alors que leurs professeurs considéraient qu’ils n’arriveraient<br />
jamais à rien.<br />
S<strong>ou</strong>vent il suffit <strong>de</strong> <strong>la</strong> confiance d’un enseignant, seul contre t<strong>ou</strong>s, contre<br />
t<strong>ou</strong>te logique, contre t<strong>ou</strong>te évi<strong>de</strong>nce, contre les mauvaises notes ; une<br />
confiance injustifiable fondée sur une intuition, un regard échangé, p<strong>ou</strong>r<br />
permettre à un élève <strong>de</strong> se rétablir. Marcel Pagnol, dans « La tragédie <strong>de</strong><br />
Lagneau » (Le Temps <strong>de</strong>s am<strong>ou</strong>rs), n<strong>ou</strong>s raconte l’histoire d’un cancre<br />
maltraité par son père camionneur, et que sa mère et sa tante s’efforcent <strong>de</strong><br />
protéger <strong>de</strong>s violences du bonhomme ; elles falsifient les bulletins<br />
103