L'école ou la guerre civile - Site de Philippe Meirieu
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<strong>Philippe</strong> <strong>Meirieu</strong> - Marc Guiraud L’école contre <strong>la</strong> <strong>guerre</strong> <strong>civile</strong><br />
Car voilà ce qui bloque fondamentalement le fonctionnement <strong>de</strong> l’école :<br />
les rapports humains y sont régis par <strong>la</strong> force, <strong>la</strong> séduction <strong>ou</strong> <strong>la</strong> violence,<br />
et il n’existe pas, entre les élèves, les enseignants et leur administration, <strong>de</strong><br />
véritable contrat négocié, accepté, reconnu p<strong>ou</strong>r son caractère formateur.<br />
Quels propos se tiennent dans une salle <strong>de</strong>s professeurs ? « Tenir » <strong>la</strong><br />
c<strong>la</strong>sse, « mater » les fortes têtes, « s’imposer dès les premiers c<strong>ou</strong>rs »,<br />
« tenir <strong>la</strong> dragée haute aux élèves » <strong>ou</strong> les « subjuguer »... « Une c<strong>la</strong>sse,<br />
c’est comme un cheval, elle doit t<strong>ou</strong>t <strong>de</strong> suite comprendre qui est le maître,<br />
sinon c’est elle qui prend le p<strong>ou</strong>voir et on ne peut plus rien en faire... » De<br />
telles affirmations témoignent <strong>de</strong> <strong>la</strong> déliquescence <strong>de</strong> l’institution et <strong>de</strong> son<br />
impuissance à établir <strong>de</strong>s objectifs précisément définis, à faire respecter<br />
une loi et <strong>de</strong>s interdits c<strong>la</strong>irement affichés.<br />
En effet, il faut <strong>de</strong>s interdits p<strong>ou</strong>r faire fonctionner l’école, comme t<strong>ou</strong>te<br />
autre institution : d’abord l’interdit <strong>de</strong> <strong>la</strong> violence, puis un ensemble<br />
d’autres interdits qui lui sont rattachés et qui l’incarnent dans <strong>de</strong>s situations<br />
particulières. L’adulte n’a pas à se culpabiliser quand il impose <strong>de</strong>s règles.<br />
Rien n’est plus ridicule, aux yeux <strong>de</strong>s élèves eux-mêmes, que les tentatives<br />
<strong>de</strong>s éducateurs p<strong>ou</strong>r expier leur position en se situant comme <strong>de</strong>s grands<br />
frères sympathiques qui ne se permettraient pas <strong>de</strong> poser c<strong>la</strong>irement <strong>de</strong>s<br />
limites. Irresponsable, cette attitu<strong>de</strong> est intenable car les élèves<br />
s’eng<strong>ou</strong>ffrent dans les brèches ainsi <strong>ou</strong>vertes et s’appliquent à déstabiliser<br />
une personnalité qu’ils reconnaissent très vite comme fragile.<br />
P<strong>ou</strong>rtant, il ne s’agit pas <strong>de</strong> poser <strong>de</strong>s interdits par caprice <strong>ou</strong> confort.<br />
Interdire le bruit en c<strong>la</strong>sse simplement p<strong>ou</strong>r p<strong>ou</strong>voir « enseigner en paix »<br />
n’a aucun sens. Un interdit ne vaut que par ce qu’il autorise, il ne sera<br />
respecté que si l’on peut pr<strong>ou</strong>ver qu’il offre <strong>de</strong>s possibilités infiniment plus<br />
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