L'école ou la guerre civile - Site de Philippe Meirieu
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<strong>Philippe</strong> <strong>Meirieu</strong> - Marc Guiraud L’école contre <strong>la</strong> <strong>guerre</strong> <strong>civile</strong><br />
P<strong>ou</strong>r que <strong>la</strong> n<strong>ou</strong>velle école obligatoire puisse fonctionner, il faut,<br />
évi<strong>de</strong>mment, qu’elle s’empèche <strong>de</strong> reproduire, par facilité <strong>ou</strong> par<br />
mimétisme, le désordre social. C’est p<strong>ou</strong>rquoi une frontière est nécessaire<br />
entre <strong>la</strong> société <strong>civile</strong> et <strong>la</strong> cité sco<strong>la</strong>ire : une frontière, pas un Mur <strong>de</strong><br />
Berlin <strong>ou</strong> un ri<strong>de</strong>au <strong>de</strong> fer, d’ailleurs obsolètes, mais une séparation qui<br />
permette à l’école <strong>de</strong> j<strong>ou</strong>er pleinement son rôle spécifique et <strong>de</strong> préserver<br />
chez les jeunes « le p<strong>ou</strong>voir <strong>de</strong> changer le mon<strong>de</strong> », selon <strong>la</strong> formule <strong>de</strong><br />
Hannah Arendt.<br />
Concrètement, dans nos villes, <strong>la</strong> séparation entre <strong>la</strong> société et l’école est<br />
matérialisée par un mur, une enceinte fermée qui ne s’<strong>ou</strong>vre qu’à certaines<br />
heures p<strong>ou</strong>r <strong>la</strong>isser entrer et sortir les élèves. Portant, une fois le portail<br />
fermé, l’école n’est pas encore à l’abri <strong>de</strong>s ven<strong>de</strong>urs <strong>de</strong> drogue et autres<br />
chefs <strong>de</strong> ban<strong>de</strong>, sans parler <strong>de</strong>s agressions et dégradations commises par les<br />
élèves eux-mêmes, ni <strong>de</strong> cette multitu<strong>de</strong> d’incivilités qui témoignent que<br />
cette maison n’est, d’aucune manière, <strong>la</strong> leur, qu’ils ne l’habitent pas et<br />
qu’ils n’ont pas construit les règles nécessaires à sa pérennité. Il est inutile<br />
<strong>de</strong> mettre en p<strong>la</strong>ce <strong>de</strong>s barbelés et <strong>de</strong>s guérites p<strong>ou</strong>r protéger l’école :<br />
l’agresseur est, bien s<strong>ou</strong>vent, déjà dans <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce... Dans une idéologie<br />
sécuritaire qui sacrifierait systématiquement <strong>la</strong> formation au maintien <strong>de</strong><br />
l’ordre, les seules écoles vraiment protégées seraient finalement <strong>de</strong>s écoles<br />
vi<strong>de</strong>s.<br />
La frontière matérielle ne suffit pas. C’est lorsque l’école aura retr<strong>ou</strong>vé<br />
du prestige et du sens auprès <strong>de</strong>s jeunes qu’ils <strong>la</strong> respecteront<br />
véritablement. Le contrat implicite qui a tenu le c<strong>ou</strong>p, vaille que vaille,<br />
jusqu’à ces <strong>de</strong>rnières années disait : « Si tu veux un travail intéressant, il<br />
faut que tu réussisses ton examen, et si tu veux réussir ton examen il faut<br />
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