L'école ou la guerre civile - Site de Philippe Meirieu
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<strong>Philippe</strong> <strong>Meirieu</strong> - Marc Guiraud L’école contre <strong>la</strong> <strong>guerre</strong> <strong>civile</strong><br />
possibilités d’apprentissage offertes par l’environnement ; ils entretiennent,<br />
s<strong>ou</strong>vent avec <strong>la</strong> complicité <strong>de</strong> leurs parents, un certain mépris envers<br />
l’école, mais le contiennent dans <strong>de</strong>s limites acceptables p<strong>ou</strong>r ne pas<br />
compromettre leur <strong>de</strong>stin sco<strong>la</strong>ire. Les autres, les « barbares hard », sont<br />
plus difficiles à supporter : ils quittent <strong>la</strong> c<strong>la</strong>sse sans autorisation et<br />
reviennent une <strong>de</strong>mi-heure plus tard en ayant cassé <strong>de</strong>ux carreaux et<br />
éventré trois cartables ; ils injurient l’enseignant en plein c<strong>ou</strong>rs <strong>ou</strong> affichent<br />
publiquement leur mépris p<strong>ou</strong>r les règles <strong>de</strong> l’institution sco<strong>la</strong>ire. Ils savent<br />
t<strong>ou</strong>cher là où ce<strong>la</strong> fait mal : beauc<strong>ou</strong>p d’enseignants, <strong>de</strong>s femmes en<br />
particulier, en savent quelque chose.<br />
La tentation est gran<strong>de</strong>, au nom <strong>de</strong> l’école républicaine, <strong>de</strong> b<strong>ou</strong>ter les<br />
barbares hors <strong>de</strong> <strong>la</strong> cité sco<strong>la</strong>ire. Ainsi, progressivement, une idée s’insinue<br />
: remp<strong>la</strong>cer au fronton <strong>de</strong>s écoles « Liberté, égalité, fraternité » par une<br />
autre maxime, plus confortable : « Nul n’entre ici s’il n’est pas déjà<br />
éduqué... et bien éduqué si possible ! »<br />
Ainsi, les nostalgiques <strong>de</strong> l’école <strong>de</strong> Jules Ferry préconisent-ils d’exclure<br />
t<strong>ou</strong>t simplement les n<strong>ou</strong>velles catégories d’élèves, ceux qui arrivent à<br />
l’école dép<strong>ou</strong>rvus <strong>de</strong> t<strong>ou</strong>te éducation. Le but, plus <strong>ou</strong> moins av<strong>ou</strong>é, est<br />
d’écarter les gêneurs p<strong>ou</strong>r continuer à enseigner dans <strong>de</strong>s c<strong>la</strong>sses d’élite à<br />
quelques bons élèves déjà bien préparés. La conséquence, c’est que<br />
l’orientation se pervertit en système d’exclusion. Alors qu’il faudrait<br />
affronter l’évolution sociale et relever ses défis, on choisit les solutions les<br />
plus archaïques. Au lieu <strong>de</strong> se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r comment l’école p<strong>ou</strong>rrait<br />
socialiser <strong>la</strong> parole, on <strong>la</strong>isse les barbares compromettre son<br />
fonctionnement : on campe dans <strong>la</strong> mo<strong>de</strong>rnité en préservant quelques<br />
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