Comparer les droits, résolument - Pierre Legrand
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Profil couleur : Profil d’imprimante CMJN gØnØrique<br />
Composite Trame par dØfaut<br />
« Droit » et comparaison 107<br />
comprendrait que certains aspects, on songe aux <strong>droits</strong> de tradition<br />
romaniste selon <strong>les</strong>quels la doctrine est considérée<br />
comme une (quasi-)source de droit 24 . La définition ci-dessus<br />
prévoit en effet que seu<strong>les</strong> <strong>les</strong> règ<strong>les</strong> « législatives, jurisprudentiel<strong>les</strong><br />
et coutumières » seraient constitutives d’un droit.<br />
On ne tiendrait donc pas compte de la doctrine française<br />
lorsque viendrait le moment d’étudier le droit français. Or<br />
c’est précisément cette partie du droit français qu’il importe<br />
de considérer si l’objectif est de comprendre le droit français de<br />
l’intérieur puisque la place qui y est faite à la doctrine atteste<br />
d’une conception toute particulière du droit 25 . Somme toute,<br />
la définition du « droit » avancée par notre comparatiste<br />
anglais se révèle problématique dans la mesure où, traduisant<br />
ce qui lui est familier, elle pose des critères demeurant extérieurs<br />
aux <strong>droits</strong> étudiés 26 . Des illustrations tout aussi probantes<br />
pourraient être imaginées mettant en scène des énoncés<br />
fournis par des comparatistes d’autres provenances 27 .<br />
Une définition élaborée dans une perspective interne ne<br />
soulève pas <strong>les</strong> mêmes difficultés. Formulée en regard de ce<br />
que <strong>les</strong> acteurs dans tel ou tel autre droit conçoivent comme<br />
étant du droit, une telle définition dicterait que soient inclus<br />
dans le champ d’étude, pour en revenir à l’exemple ci-dessus,<br />
autant <strong>les</strong> <strong>droits</strong> non étatiques que la doctrine du droit français.<br />
Pour ce qui concerne <strong>les</strong> <strong>droits</strong> non étatiques, le comparatiste<br />
se serait tout simplement demandé si ces <strong>droits</strong> constituent<br />
du droit aux yeux de leurs participants respectifs 28 .De<br />
24. Voir par exemple R. C. van Caenegem, Judges, Legislators and Professors,<br />
Cambridge, Cambridge University Press, 1987, pp. 68-113.<br />
25. Sur la conception de la doctrine prévalant en droit français, voir par<br />
exemple Catherine Valcke, « Quebec Civil Law and Canadian Federalism », (1996)<br />
21 Yale J. of International Law 67, pp. 86-88.<br />
26. Voir en ce sens <strong>Legrand</strong>, op. cit., note 6, pp. 17-18 : « Le droit étranger vu à<br />
travers la lorgnette du comparatiste, ce serait ainsi [...] un collage hétérogène bricolé<br />
par lui eu égard à une problématique par lui élaborée. »<br />
27. Il est ainsi frappant de constater que la société savante française dévolue<br />
aux études juridiques comparatives, fondée à Paris en 1869, se nomme « Société de<br />
législation comparée ». Voir Lambert, op. cit., note 19, pp. 8-15.<br />
28. Par « participants », nous entendons <strong>les</strong> intervenants comme agents à titre<br />
juridique plutôt que d’un point de vue individuel. Il ne s’agit donc pas ici d’un exercice<br />
statistique de sondage de l’opinion personnelle des individus concernés, mais<br />
bien d’un travail herméneutique de reconstruction de la culture juridique propre à<br />
un droit donné. Voir en ce sens Harry Westermann, Interessenkollisionen und ihre<br />
<strong>Legrand</strong>1.prn<br />
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mercredi 8 avril 2009 16:24:12<br />
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