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Comparer les droits, résolument - Pierre Legrand

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Profil couleur : Profil d’imprimante CMJN gØnØrique<br />

Composite Trame par dØfaut<br />

290 Simone Glanert<br />

mot est aussi effet de l’histoire (pour ne pas parler de la politique,<br />

de la psychologie, de l’économie, de la religion, de<br />

l’épistémologie und so weiter...). Un interprète abordant<br />

aujourd’hui l’ « erreur » ne pourra faire autrement que de lui<br />

attribuer un sens, au vu de ce qu’il aura pu appréhender, lui,<br />

de l’histoire (ou de la politique, de la psychologie, de l’économie...).<br />

Mais comme cette maîtrise sera nécessairement<br />

incomplète, c’est-à-dire partielle ou sectorielle (comment<br />

pourrait-on saisir toute l’histoire telle quelle ?), l’interprète<br />

ne pourra faire autrement que d’imputer « un » sens à<br />

l’ « erreur ». Quoi que ce soit qui constituerait « le » sens<br />

(complet) de l’ « erreur » se soustraira donc toujours à son<br />

énonciation. Ainsi la complexité intrinsèque à chaque mot<br />

de la langue fait que, même lorsqu’il s’agit d’en fixer le<br />

sens intra-langagier (à la différence d’une traduction, qui<br />

implique plus d’une langue), l’exercice se révèle impossible.<br />

Il convient en tout cas de constater qu’en matière de traduction,<br />

la différence d’une langue l’autre est à la fois omniprésente<br />

et irréductible. Ayant pris conscience de cette complication,<br />

Derrida suggère de remplacer le mot « traduction »<br />

par « transformation », qui lui semble plus adéquat. Ainsi « à<br />

la notion de traduction, il faudra substituer une notion de<br />

transformation : transformation réglée d’une langue par une<br />

autre, d’un texte par un autre. Nous n’aurons et n’avons en<br />

fait jamais eu affaire à quelque “transport” de signifiés purs<br />

que l’instrument – ou le “véhicule” – signifiant laisserait<br />

vierge et inentamé, d’une langue à l’autre, ou à l’intérieur<br />

d’une seule et même langue » 34 .<br />

De manière certes aporétique, Derrida s’empresse toutefois<br />

d’ajouter qu’il ne faut pas pour autant conclure à l’encontre<br />

de toute traduction. Malgré le fait qu’une reproduction<br />

fidèle de quoi que ce soit qu’on appellerait « le » sens se<br />

révèle impossible, l’original demeure en effet traduisible, et<br />

doit le demeurer. Selon Derrida, « [u]n texte ne vit que s’il<br />

sur-vit, et il ne sur-vit que s’il est à la fois traductible et intraduisible<br />

[...]. Totalement traductible, il disparaît comme<br />

texte, comme écriture, comme corps de langue. Totalement<br />

intraduisible, même à l’intérieur de ce qu’on croit être une<br />

34. Derrida, Positions, op. cit., note 28, p. 31 [<strong>les</strong> italiques sont de l’auteur].<br />

<strong>Legrand</strong>1.prn<br />

V:\55125\55125.vp<br />

mercredi 8 avril 2009 16:24:25<br />

290

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