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Comparer les droits, résolument - Pierre Legrand

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Profil couleur : Profil d’imprimante CMJN gØnØrique<br />

Composite Trame par dØfaut<br />

210 <strong>Pierre</strong> <strong>Legrand</strong><br />

le sens d’une amélioration de la justice. De plus, un code contribue<br />

à la cohérence du droit, notamment entre des domaines<br />

considérés comme étant relativement indépendants <strong>les</strong><br />

uns des autres, tels que le droit des contrats et le droit des<br />

successions, ou encore à l’intérieur d’un même domaine – ce<br />

qui va aussi dans le sens d’une amélioration de la justice. En<br />

quoi un code peut-il donc être perçu négativement, comme<br />

c’est le cas en Angleterre ? Du point de vue des Anglais, le<br />

problème tient principalement au fait qu’un code met l’accent<br />

sur des valeurs comme la logique et la symétrie, qu’il se<br />

présente (et qu’il présente le droit) comme un système objectivement<br />

rationnel. On craint, en Angleterre, que ces idées de<br />

cohérence, de logique, de systémique, empêchent le juge<br />

d’exercer sa discrétion là où <strong>les</strong> faits appellent des solutions<br />

pragmatiques, même si cel<strong>les</strong>-ci ne sont pas cohérentes avec<br />

d’autres solutions déjà existantes. Les Anglais sont très attachés<br />

à l’idée selon laquelle la justice ne relève pas tant de l’application<br />

d’une logique « objective » à tous <strong>les</strong> litiges que de<br />

l’adaptation de la décision du juge aux faits de chaque<br />

espèce. Et il en va également ainsi en présence de textes législatifs,<br />

qu’on retrouve bien sûr en Angleterre comme dans<br />

d’autres <strong>droits</strong>.<br />

Lorsque le juriste se situe face à un droit comme le droit<br />

français qui dit oui au code civil et à un droit comme le droit<br />

anglais qui dit non au code civil, il doit constater que ces<br />

deux <strong>droits</strong> sont « incommensurab<strong>les</strong> » l’un par rapport à<br />

l’autre. Qu’est-ce que l’ « incommensurabilité » ? Il s’agit de<br />

l’absence de « commune mesure » à ces deux <strong>droits</strong>, laquelle,<br />

seule, permettrait de <strong>les</strong> hiérarchiser, de <strong>les</strong> « classer » (de<br />

dire lequel des deux, par exemple, est le meilleur droit). Si<br />

deux entités sont incommensurab<strong>les</strong> l’une par rapport à<br />

l’autre, c’est précisément qu’el<strong>les</strong> sont « sans commune<br />

mesure » (voici, au sens littéral, ce que signifie le mot<br />

« incommensurable »). Imaginons que j’aie devant moi une<br />

table basse faisant 50 cm de longueur et un bureau faisant<br />

90 cm de longueur. Il m’est possible de dire qu’en vertu d’une<br />

commune mesure (en l’espèce, le centimètre), le bureau est<br />

plus long que la table. Je ne peux pas faire de même lorsqu’il<br />

s’agit du droit français avec code et du droit anglais sans<br />

code, c’est-à-dire du droit anglais casuiste (ce mot connote<br />

<strong>Legrand</strong>1.prn<br />

V:\55125\55125.vp<br />

mercredi 8 avril 2009 16:24:19<br />

210

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