Comparer les droits, résolument - Pierre Legrand
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Profil couleur : Profil d’imprimante CMJN gØnØrique<br />
Composite Trame par dØfaut<br />
204 Claire Joubert<br />
ce que le fait de regarder ces idées depuis le point de vue du<br />
poème révèle de leurs présupposés ? Et quels obstac<strong>les</strong> pour<br />
une critique des solutions identitaires au problème de l’altérité<br />
cette perspective permet-elle de repérer en el<strong>les</strong> ? Une<br />
poétique du peuple, parce qu’elle rend inconcevable l’antécédence<br />
du sujet et du rapport intersubjectif à leur énonciation,<br />
peut penser un peuple du poème, soit un peuple produit<br />
par l’art dans le langage et spécifique à lui, c’est-à-dire une<br />
conception du politique comme en constitution dans le présent<br />
discursif de son invention et qui tire sa capacité de<br />
dénationalisation, sa nationalité critique et sa critique des<br />
nationalismes, de la force d’étrangèreté du langage. En ce<br />
sens, une poétique du peuple est elle-même critique à la fois<br />
de l’esthétisation de la littérature et de la sociologisation de<br />
la culture. Par « peuple du poème », j’entends non pas un<br />
élargissement à la dimension politique, mais bien un équivalent,<br />
du point de vue politique, du concept de « sujet du<br />
poème », au sens où Meschonnic le pense comme étant déjà<br />
en lui-même trans-sujet dans l’altérité du langage. On trouve<br />
là la même force discursive que l’étranger des langues, soit le<br />
vivant (le subjectivant, le socialisant, le politisant) du<br />
discours dans le langage. Pour déverrouiller le pouvoir critique<br />
de cette historicité, de cette altérité radicale du peuple<br />
comme agencement collectif d’énonciation 77 , qui est à venir<br />
dans l’historicité du langage et vivant dans la différence des<br />
langues-cultures, <strong>les</strong> procédés du comparatisme ne suffisent<br />
pas, non plus que son « art » du rapport. Aussi le comparatisme<br />
se doit de faire une poétique de l’altérité, qui sera<br />
nécessairement moins l’activation délibérée d’un principe<br />
comparatiste (d’un comparatisme de principe) que la théorisation<br />
de l’altérité à l’œuvre dans le poème même et de<br />
l’activité critique, au sens de Mallarmé, du littéraire dans la<br />
culture.<br />
77. On aura compris que je me réfère à la valeur que prend ce concept d’ « agencement<br />
collectif d’énonciation » dans le discours de Deleuze et Guattari, op. cit.,<br />
note 71, quand il entre en synonymie avec le concept de « peuple » (concept-poème<br />
et concept d’une poétique du politique) que ces auteurs empruntent au Journal de<br />
Kakfa, « peuple » intervenant alors comme minoration de « culture ».<br />
<strong>Legrand</strong>1.prn<br />
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mercredi 8 avril 2009 16:24:19<br />
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