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Comparer les droits, résolument - Pierre Legrand

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Profil couleur : Profil d’imprimante CMJN gØnØrique<br />

Composite Trame par dØfaut<br />

286 Simone Glanert<br />

En tant que langue de spécialité qui véhicule toujours une<br />

culture juridique donnée, la langue du droit n’est pas à l’abri<br />

de ces disparités inter-langagières 19 . Par exemple, il n’y a pas<br />

d’identité signifiante entre la notion allemande de « Kaufvertrag<br />

» et l’expression française « contrat de vente » en dépit<br />

de l’indéniable apparentage terminologique des deux formu<strong>les</strong><br />

20 . En Allemagne, à l’instar du droit romain, la vente de<br />

biens meub<strong>les</strong> intervient en deux étapes. Ainsi un acte d’engagement<br />

en vertu duquel <strong>les</strong> parties s’accordent sur la chose<br />

à livrer et le prix à payer selon le § 433 BGB est suivi d’un acte<br />

de disposition ayant pour objet de réaliser le transfert de propriété<br />

conformément au § 929 BGB 21 . D’après le « principe<br />

d’abstraction » (« Abstraktionsprinzip »), chacune des deux<br />

opérations juridiques doit être appréciée de manière individuelle<br />

afin de garantir la sécurité des transactions. En<br />

revanche, la France s’est éloignée du droit romain pour retenir<br />

une conception unitaire de la vente. En effet, à partir du<br />

XIV e siècle, le droit de la vente s’est orienté vers le principe du<br />

transfert instantané de la propriété, qui pouvait résulter<br />

d’une simple clause du contrat dite de « dessaisine-saisine »,<br />

selon laquelle le vendeur déclarait se dessaisir de la chose<br />

vendue « de droit et à l’instant » 22 . Le Code civil français,<br />

ayant jugé inutile un tel formalisme, prévoit, aux artic<strong>les</strong><br />

1138 et 1583, que le transfert de propriété est accompli<br />

par le seul échange des consentements, sans être subordonné<br />

à l’existence d’une clause expresse ou à la remise du bien. On<br />

aura compris que <strong>les</strong> mots « Kaufvertrag » et « contrat de<br />

vente », quoiqu’en relation de correspondance directe sur le<br />

plan technique, ne peuvent pas être appréhendés comme se<br />

19. Il vaut de noter que de plus en plus d’études spécialisées se consacrent aux<br />

différences entre <strong>les</strong> langues juridiques. Voir par exemple Heikki E. S. Mattila,<br />

Comparative Legal Linguistics, trad. par Christopher Goddard, Aldershot, Ashgate,<br />

2006.<br />

20. Voir Claude Witz, « Analyse critique des règ<strong>les</strong> régissant le transfert de propriété<br />

en droit français à la lumière du droit allemand », dans Festschrift für Günther<br />

Jahr, sous la dir. de Michael Martinek, Jürgen Schmidt et Elmar Wadle, Tübingen,<br />

J. C. B. Mohr, 1993, pp. 533-549.<br />

21. Münchener Kommentar zum Bürgerlichen Gesetzbuch : Schuldrecht, Besonderer<br />

Teil I, sous la dir. de Wolfgang Krüger et Harm Peter Westermann, 5 e éd.,<br />

Munich, C. H. Beck, 2008, p. 6.<br />

22. Voir Philippe Malaurie, Laurent Aynès et <strong>Pierre</strong>-Yves Gautier, Les contrats<br />

spéciaux, 3 e éd., Paris, Defrénois, 2007, p. 162 [j’ai omis <strong>les</strong> italiques].<br />

<strong>Legrand</strong>1.prn<br />

V:\55125\55125.vp<br />

mercredi 8 avril 2009 16:24:24<br />

286

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