Comparer les droits, résolument - Pierre Legrand
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Profil couleur : Profil d’imprimante CMJN gØnØrique<br />
Composite Trame par dØfaut<br />
La comparaison des <strong>droits</strong> expliquée à mes étudiants 215<br />
importance à un certain article de revue paru en 1997 ;<br />
l’autre aura jugé que ce texte méritait, au contraire, d’être<br />
valorisé, puisqu’il offrait une explication particulièrement<br />
utile des décisions jurisprudentiel<strong>les</strong> rendues au cours des dix<br />
années antérieures. Ce que je veux montrer, c’est qu’au fil<br />
d’arrivée, chaque juriste nous livrera une lecture du droit<br />
anglais qui sera nettement influencée par sa situation à lui,<br />
qui sera donc « située » (c’est-à-dire qui sera orientée par tout<br />
un ensemble de circonstances et de choix, dont certains ne<br />
seront pas même véritablement conscients) 1 . Le caractère<br />
objectif de tel<strong>les</strong> études est évidemment exclus. Et puisque<br />
toutes <strong>les</strong> recherches se déroulent de cette manière (il y a toujours<br />
des chercheurs en cause, chacun avec son vécu, chacun<br />
effectuant ses choix), l’objectivité n’a rien à voir avec<br />
quelque recherche juridique que ce soit.<br />
Comment savoir, dès lors, lequel des deux chercheurs nous<br />
fournit la bonne réponse quant à l’état du droit anglais relativement<br />
à une problématique donnée ? À mon sens, il ne faut<br />
pas aborder la question en ces termes. Nous ne sommes pas<br />
dans le domaine de la mathématique et il ne saurait y avoir<br />
de « bonne » réponse au sens où la « bonne » réponse à l’équation<br />
« 2 + 2 » serait « 4 ». Certes, il y a sans doute des<br />
« mauvaises » réponses possib<strong>les</strong>. Il en irait ainsi du chercheur<br />
qui nous dirait du droit anglais du divorce qu’il n’a pas<br />
changé depuis cinquante ans alors que des réformes législatives<br />
importantes ont été adoptées. Mais, encore une fois, il n’y<br />
a pas de « bonnes » réponses envisageab<strong>les</strong>, en tout cas dès<br />
qu’il ne s’agit plus d’interrogations strictement techniques du<br />
type « Quand la loi du 11 novembre 1999 est-elle entrée en<br />
vigueur ? ». Ce que chaque juriste français s’intéressant au<br />
droit anglais met en avant, c’est une interprétation du droit<br />
anglais, son interprétation à lui, qu’il a construite à partir des<br />
matériaux qu’il a choisi d’utiliser (décisions de jurisprudence<br />
; lois ; manuels, traités, artic<strong>les</strong> et textes en tout<br />
genre). Nous voici donc en présence de deux interprétations,<br />
aucune ne pouvant prétendre à l’objectivité. Ces deux inter-<br />
1. C’est pour cette raison que la notion de « mentalité » ne suffit pas à rendre<br />
compte de l’ensemble des décisions qui auront été prises. Il y a aussi des gestes posés<br />
ou des décisions prises qui relèvent non pas de l’esprit, mais de l’inconscient.<br />
<strong>Legrand</strong>1.prn<br />
V:\55125\55125.vp<br />
mercredi 8 avril 2009 16:24:20<br />
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