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Comparer les droits, résolument - Pierre Legrand

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Profil couleur : Profil d’imprimante CMJN gØnØrique<br />

Composite Trame par dØfaut<br />

Toute comparaison des <strong>droits</strong> est une fiction 63<br />

Mais si, selon la conception de Searle, « <strong>les</strong> éléments fictionnels<br />

et <strong>les</strong> éléments référentiels se jouxte[nt] dans une<br />

coexistence tranquille » à l’intérieur du texte de la comparaison<br />

90 , il n’en demeure pas moins que l’entendement du discours<br />

comparatiste que je défends entraîne des implications<br />

qui ne sauraient être que controversées puisque cette vision<br />

synchronique véhicule un processus de relativisation. À mon<br />

sens, le texte de la comparaison ne peut jamais rendre compte<br />

que de ce que le comparatiste aura compris de la « réalité »<br />

du droit (ou des <strong>droits</strong>) 91 . Précisons ce propos.<br />

Pour <strong>les</strong> théoriciens de la fiction, « un univers est composé<br />

d’une base – un monde réel – entourée par une constellation<br />

de mondes alternatifs » 92 . À l’intérieur de cet ensemble, « [l]e<br />

monde réellement réel jouit d’une priorité ontologique certaine<br />

sur <strong>les</strong> mondes du faire-semblant », <strong>les</strong> deux niveaux<br />

étant liés par une relation de correspondance 93 . Transposée<br />

dans le domaine de la comparaison juridique, une telle<br />

théorie signifie que le monde « réel » du droit constitue la<br />

fondation ontologique qui étaye le monde du texte de la comparaison.<br />

Ce dernier se réfère ainsi au « réel juridique », sans<br />

que l’on puisse pourtant l’identifier à lui. Dans cette perspective<br />

ontologique et textuelle, le rapport entre le monde du<br />

texte et le monde du « réel juridique » explique pourquoi<br />

deux comparatistes n’offriront jamais la même analyse des<br />

deux <strong>droits</strong> qu’ils comparent. Comme le monde réel « peut<br />

être convenablement décrit par un nombre considérable,<br />

sinon infini » de textes différents, <strong>les</strong> énoncés offrant des<br />

explications comparatives par rapport aux <strong>droits</strong> « réels »<br />

peuvent se multiplier indéfiniment tout en se maintenant en<br />

relation avec le « réel juridique » 94 . Ainsi <strong>les</strong> différentes versions<br />

proposées par différents comparatistes par rapport à<br />

90. Montalbetti, op. cit., note 12, p. 33.<br />

91. Voir par exemple Genette, supra, note 11. Voir également <strong>Legrand</strong>, Droit<br />

comparé, op. cit., note 74, pp. 17-18 : « Le droit étranger vu à travers la lorgnette du<br />

comparatiste, ce serait ainsi – en tout cas, bien davantage qu’on ne le croit – un collage<br />

hétérogène bricolé par lui eu égard à une problématique par lui élaborée. »<br />

92. Pavel, op. cit., note 6, p. 84.<br />

93. Id., p. 76.<br />

94. Id., p. 85. Voir également id., p. 92 : « La double ontologie de la fiction<br />

reflète, en la simplifiant, la profonde hétérogénéité des textes. L’hétérogénéité, et<br />

non l’homogénéité, [est] la règle en matières textuel<strong>les</strong>. »<br />

<strong>Legrand</strong>1.prn<br />

V:\55125\55125.vp<br />

mercredi 8 avril 2009 16:24:09<br />

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