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LIVRE PREMIER. 7 S
compagnie, Se de telle façon :& le voyant tranfide ccsnouuclIes,&
en filence, non plus pour tenir le marché dé fe taire, mais de la preffe
defaconfeienee: Pourquoy,adioufta-il, le fais-tu? Eft-ce pour eftre
Empereur? Vray ment il va bien mal à la chofe publique, s'il n'y a
que moy qui t'empefched'arriuer à l'Empire. Tune peux pas feulement
défendre ta maifon, Se perdis dernièrement vn procez par la
faueur d'vn fîmple libertin. Quoy ? n'as-tu moyen ny pouuoir en
autre chofe qu'à entreprendre Cefar? le le quitte, s'il n'y a que moy
qui empefche tes efperanccs. Pcnfcs-tu, que Paulus, qu e Fabius, que
les Coifecns Se Seruiliens te fouffrent ? Se vne fi grande trou pe de nobles,
non feulement nobles de nom, mais qui par leur vertu honorent
leur noblcife? Apres plufieurs autres propos, car il parla à luy
plus de deux heures entières: Or va,luy dit-il, ie tedonne,Cinna,la clémence $Mvie
à traiftre Se à parricide, que ic te donnay autres-fois à ennemy: emtersCinna.
que l'amitié commence de ceiourd'huy entre nous: effayonsquide
nous deux de meilleure foy, moy t'ayedonné tavie,outul'ayesreceuë.'
Et fe départit d'auec luy en cette manière. Quelque temps
après il luy donna le Confulat, fe pleignant dequoy il ne luy auoit ofé
demander. Il l'eut depuis pour fort amy,& fut feul fait par luy héritier
de fes biens. Or depuis cet accident,qui aduint à Augufte au
quarantième an de fon âge, il ny eut iamais de coniuration ny d'entreprife
contre luy,& receutvne iufte recompenfe de cette fienne
clémence. Mais il n'en aduint pas de mefme au noftre : car fa douceur
ne le feeut garantir,qu'il ne cheuft depuis aux lacs de pareille
trahifon. Tant c'eft chofe vaine Se friuolc que l'humaine prudence:
&au trauers de tous nos projette, de nos confcils& précautions,la
fortune maintient touhours lapoifellion des euenemens. Nous appelions
les Médecins heureux,quand ils arriuent à quelque bonne
fin: comme s'il n'y auoit que leur art, qui ne fe pûft maintenir de
luy-mefmc, Se qui euft les fondemens trop frefles,pour s'appuyer
de fa propre force : Se comme s'il n'y auoit que luy, qui ayt befoin
que la fortune prefte la main à fes opérations. le croy d'elle tout le
pis ou le mieux qu'on voudra: car nous n'auons, Dieu mercy ,nul
commerce enfemble. le fuis au rebours des autres : car ie la mef- Médecine meftri-
s e e m maladle
prife bien toufiours, mais quand ic fuis malade, au lieu d'entrer en > &
compofition, ie commence encore à la haïr & à la craindre : Se ^ 0Ur
refpons à ceux qui me preifent de prendre médecine, qu'ils attendent
au moins que ie fois rendu à mes forces Se à ma fanté,
pour auoir plus de moyen de fouftenir l'effort Se le hazard de leur
breuuage. le laiffe faire nature, Se prefuppofequ'elle fe foit pourueu'ë
de dents Se de griffes, pour fe défendre des affaùts qui luy
viennent, Se pour maintenir cette contexture, dequoy elle fuit la
diffolution. le crains au lieu de Piller fecourir, ainfi comme elle eft
aux prifes bien eftroites & bien iointes auec la maladie, qu'on fecoure
fon aduerfaire au lieu d'elle, & qu'on la recharge de nouueaux affaires.
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