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LIVRE SECOND. 4, 7
extirpation, que la fureur ou l'image de la mort apporte, nous délierions
prophètes & deuins. Iamais plus volontiers ie ne l'en creu.
C'eft vn pur enthoufiafme, que la faincte venté a infpiré en l'efprit
philofophique, qui luy arrache contre fa propofition ; que l'eftat
tranquille de noftre ame, l'eftat raiïïs, l'eftat plus fain, que la Philofophie
luy puiffe acquérir, n'eft pas fon meilleur eftat. Noftre veillée
eft plus endormie que le dormir : noftre fageffe moins fage que la
folie: nos fongesvalent mieux,que nos difeours: la pire place que
nous puiflions prendre, c'eft en nous. Mais penfe-elic pas, que nous
ayons Paduifemcnt de remarquer; que la voix, qui fait l'efprit, quand
il eft deprins de l'homme, fi clair-voyant, li grand, fi parfait, ôc pendant
qu'il eft en l'homme, fi terreftre, ignorant ôc ténébreux, c'eft
vne voix partant de l'efprit qui eft en l'homme terreftre, ignorant &:
ténébreux : ôc à cette caufe, voix infiablc Ôc incroyable ? le n'ay point
grande expérience de ces agitations véhémentes, eftant d'vne complexion
molle & poifante: defquelles laplufpart furprennentfubitement
noftre ame,fans luy donner loifirde fe recognoiftre. Mais
cette paflion, qu'on dit eftre produite par l'oy fiueté, au cœur des ieunes
hommes, quoy qu'elle s'achemine auec loifir, ôc d'vn progrez
mefure ; elle reprefente bien euidemment, à ceux qui cuit effayé de
s'oppofer à fon effort, la force de cette conuerfîon ôc altération, que
noftre iugement fouffre. I'ay autrefois entrepris de me tenir bandé
pour la fouftenir ôc rabattre : car il s'en faut tant que ie fois de ceux
qui conuient les vices, que ie ne les fuis pas feulement, s'ils ne m'entraifnent:
ie la fentois naiftre,croiftre,& s'augmenter en dcfpit de
ma refiftance: ôc enfin tout voyant &viuant,me faifir&polfeder,
de façon que, comme d'vne yureffe, l'image des chofes me commencent
à paroiftre autre que de couftume : ie voyois euidemment
grofïir ôc croiftre lesaduantages du fujet que i'alloisdélirant, ÔC les
fentois agrandir & enfler par le vent de mon imagination: les difficultez
de mon entreprife,s'aifer ôc fe planir : mon difeours ÔC ma
confcience, fe tirer arrière : Mais ce feu eftant euaporé, tout à vn inftant,comme
il arriue fous la clarté d'vn efclair, mon ame reprendre
vne autre forte de veue, autre eftat, ôc autre iugement : les difhcultez
de la retraite, me fembler grandes ôc inuincibles, ôc les mefmes chofes
de bien autre gouft ôc vifage, que la chaleur du defir ne me les
auoit prefentées. Lequel plus véritablement, Pyrrho n'en fçait rien.
Nous ne fommes iamais fans maladie. Les fieures ont leur chaud Ôc
leur froid: des effets d'vne paflion ardente, nous retombons aux effets
d'vne paftion frillcufe. Autant que iem'eftoisiettéen >auant,ie Similitude,
me relance d'autant en arrière.
Qualis