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4 6 ESSAIS DE MICHEL DE MONTAIGNE,
VIANDES LES CRUELS FPE- M OS OLIM. RÈÎ MIFCERE EPULIS FBECLACULA DIRA
ÛADES DES GLADIA-
TEURS : QUI BIEN FOU-
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comme les Egyptiens entre leurs feftins, faifoient prefentcr aux
BIESDVNLARGE RUIFFEAU affiftans Vnc grande image de la mort, par vn qui leur crioit: Boy.
& t efiouy, car mort tu leras tel : Auili ay-ie pris en couitumc, d alm*gt
de u mon • feulement en l'imagination , mais continuellement la
prefenteeparles Egy- N I • C r 1
f tiens après leurs mort en la bouche. Et n'eft rien dequoy ie m înrorme il volontiers,
baquets, aux affi- c fe j a m o r t fe s hommes
: quelle parole, quel vifage, quelle con-
(tans,&pourquoi. 1 • 1 1 -/L • • R
tenance us y ont eu : ny endroit des hiitoires, que ie remarque n attentiuement
: il y paroift à la farciifure de mes exemples : & que i'ay
en particulière affe&ion cette matière. Si i'eftoy faifeurdeliures,ie
feroy vn regiftre commenté des morts diuerfes : qui apprendroit les
hommes à mourir, leur apprendroit à viure. Dicearchus en fit vn de
RefolutienlUmort, pareil titre,mais d'autre & moinsvtilefin. On me dira,que l'effet
comme fe do* a>ge- f urmontc fe fi loing la penfce, qu'il n'y a fi belle efcrime, qui rie fe
perde, quand on envient là : laiffez-les dire > le préméditer donne fans
doute grand auantage : Et puis n'eft-ce rien, d'aller au moins iufques
là fans altération & fans fiebure ? Il y a plus : nature mefme nous prefte
la main, & nous donne courage. Si c'eft vne mort courte & violente,
nous n'auons pasloifirdcla craindre: fî elle eft autre, iem'apperçois
qu'à mefure que ie m'engage dans la maladie, i'entre naturellement
en quelque defdainde la vie. le trouue que i'ay bien plus
à faire à digérer cette refolution de mourir, quand ie fuis enfanté,
que ie n'ay quand iefuis en fiebure: dautant que ie ne tiens plus fi
fort aux commoditezde la vie, à raifonque ie commence à en perdre
l'vfage &T le plaifir, i'en voy la mort d'vne veue" beaucoup moins
effrayée. Cela me fait efperer, que plus ie m'efloigncray de cellelà,
& approcheray de cette-cy ,plus aifément i'entreray encompofition
de leur efchange. Tout ainfi que i'ay effayé en plufieurs autres
occurrences, ce que dit Cefar, que les chofes nous paroiffent
fouuent plus grandes de loing que de prés: i'ay trouue que faini'auois
eu les maladies beaucoupplus enhorreur,que lors que ie les ây
fenties. L'allegreffe où ie fuis, le plaifir & la force, me font paroiftre
l'autre eftat fi difproportionné à celuy-là, que par imagination ie
groffis ces incommoditez de la moitié, & les conçoy plus poifantes,
que ie ne les trouue quand ie les ay furies efpaules. I'efpere qu'il m'en
aduiendra ainfi de la mort. Voyons à ces mutations & declinaifons
ordinaires que nous fouffrons,comme nature nousdefrobelaveue
de noftre perte & empirement. Que rcfte-il àvn vieillard de la vigueur
de fa ieuneffe & de fa vie paffée ?
VISIAS'PEU^ P"T HEN FENIBRN VIT aPORTIO QUANTA MANET!
EN I» VIE / C«MEI. Gau. Cefar à vn foldat de fa garde recreu & caffé, qui vint en la ru'é, luy
demander congé de fe faire mourir : regardant fon maintien décrépit,
refpondit plaifamment : Tu penfes donc eftre en vie? Quj