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J J 4 ESSAIS DE MICHEL DE MONTAIGNE, \
pour nous, interrompre noftre deffein pour eux. C'eft tefmoignage JJC
de grandeur de courage, de retourner en la vie pour la confideration fi
.d'autruy, comme plufieurs excellens perfonnages ont fait : tk eft vn [
traict de bonté finguliere,de conferuer lavieilleffe, (delaquelle la f,
commodité plus grande, c'eft la nonchalance de fa durée, cVvn plus f.
courageux tk defdaigneux vfage de la vie,) fi on fent que CET oifice
foit doux, agréable,& profitable à quelqu'VN bien affectionné. ET en f,
jeçoit-onvne tres-plaifante recompenfe : car qu'eft-il plus doux, que ^
d'eftre fi cher à fa femme, qu'en fa confideration,on en deuienne plus J,
cher à foy-mefme? Ainfi ma Paulina m'a chargé, non feulement fa J (
crainte, mais encore la mienne. Ce ne m'a pas efté affez de eonfide- p,
rer, combien refolument ie pourrois mo\irir, mais i'ay aufïi confi- m
deré, combien irrefoluëment elle le pourroit fouffrir. le me fuis A
contraint à viure, & c'eft quelquefois magnanimité que viure. Voila" J
fes mots excellens, comme eft fon vfage. «
TDes plus excellens Hommes.
CHAPITRE XXXVI. !
\
Ç I on me demandoit le choix de tous les hommes qui y
font venus" à ma cognoiffance, il me femble en trou- *
W uer trois excellens audeffusde tous les autres. L'vn '
Homère : non pas qu'A tiftote ou Varro (pour exemple)
ne fuffent à l'aduenture auffi fçau ans que luy, ny
pofnble encore qu'en fon art mefme, Virgile ne luy foit comparable,
le le laiffe à iuger à ceux qui lescognoiffent tous deux. Moy qui n'en
cognoy que l'vn, puis feulement dire cela, félon ma portée ; que ie ne
Les rers cfu'ii fonne c r o v p a s q U e \ cs Mufes mefmes allaffent au delà du Romain.
auec fadofte lyre, rel-
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fembicnr ceux que le
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Taie facit carmen docta teftudine, quale
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Dieu Cynthien mefure A i . . r . K ,. 1
fur fa corde, par l'im- Ljnthius 4mpojitts tempérât arttcults. '
poficion de fes doigts. *j* outef0is e n c c iugement, encore rie faudroit-il pas oublier, que |
Homère,
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çuide & < principalement d'Homère que Virgile tient fa fufEfance,que |
maiftre éfefcole de c'eft ion guide,&maiftred'efcole: &qu'vnfeul trai&de l'Iliade,a
Virgile. fourny de corps tk de matière, à cette grande tk cfiuine Eneïde. Ce
N'eft pas ainfi que ie compte : i'y méfie plufieurs autres circonftances,
qui me rendent ce perfonnage admirable, quafi au deffus de l'humaine
condition. Et à la vérité, iem'eftonne fouuent, que luy qui a produit,
tk mis en crédit au Monde plufieurs deïtez,par fon au&oritê,
Homère tres-par- N'a gaigné rangdeDieuluy-mçfme. Eftant aueugle,indigent,eftant
fait en la cognoif- aUantque les Sciences fuffent rédigées en règle, tk obferuations cerfance
de toutes cho- t a m ç s. ^\ t $ a t a f l t COgnuës, que tous ceux qui fe font méfiez depuis
d'eftablirdes polices, de conduire guerres, &d'efcrire oudelarelin
gion, ou de la Philofophie, en quelque fecte que et foit, ou des arts»