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ESSAIS DE MICHEL DE MONTAIGNE,
cueillant & preuenant ta male-fortune : & de perdre le prêtent,
par la crainte du futur : & eftre dés cette heure miferable, parce que
tu le dois eftre auec le temps > Ce font fes mots. La Science nous fait
volontiers vn bon office, de nous inftruire bien exactement des dimenfions
des maux,
P a r les foucis n o s ef- _ . 1-1
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p r n s a y g u j i j n t . Luris dcucns mortalia corda.
Ce feroit dommage, fi partie de leur grandeur efchappoit à noftre
fentiment &c cognoiffance. Il eft certain, qu'à la plufpart, la préparation
à la mort, a donné plus de tourment, que n'a fait lafouffrance.
n ^ L t i t ' n i i t II fut îadis véritablement dit, & par vn bien iudicieux Autheur, ykfiw
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°,cjuamcogitatio. Lefentiment de lamortpre-
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..,, fente, nousanime par fois de foy-mefme, d'vne prompte refolurion
Fteparatio dkriort . . . i r j • • 1 l i r 1 iplus
difficile la de ne plus euiter choie du tout ineuitable. Plufieurs gladiateurs
foujfrancede la mort fe font veus au temps paffé , après auoir coiiardement combattu,
mefme. aualler courageufement la mort : offrans leur gofierau fer de l'ennemy
j & le conuians. La veue efloignée de la mort aduenir , a befoin
d'vne fermeté lente , èc difficile par confequent à fournir. Si
vous ne fçauez pas mourir, ne vous chaille,Nature vous en infor-
, , mera fur le champ, piaillement & fuffifamment: elle fera exacte-
V o u s c h e r c h e z e n I r r i i\ r
v a i n , ô m o u c i s , l'heure ment cette beiongne pour vous, n enempelcnez pas voftre loin.
d u trcfpas, Si p a r q u e l l e
v o y e la m o r t v o u s p o u r - _ r n l r • 1
ra f u r p r e n d r e i II y a Incertam fruftra mortales funerts mram
tàt^L^iaSr": Q**ritis j & quafu mors aàitura via:
d v n e r u i n e certaine : & Pœna minor certam fubïto per ferre ruïnam,
c, eit c h o i e très g n e h i e , J I J
d e î u p p o r t e r i ô g - t e m p s Quod tïmeas, çramus fiftïnuiffe aiu.
l'attente & I a f a c c d ' v n e ' «-> l J JJ
c h o f e r e d o u t a b l e . i>>- ^ Q U S t r o ublons la vie par le foin de la mort, & la mort par le foin de
la vie. L'vne nous ennuyé, l'autre nous effraye. Ce n'eft pas contre la
La monne doit eftre m 0rt, que nous nous préparons, c'eft chofe trop momentanée :Vn
preme née. quart d'heure de pafïïonfans confequence, fans nuifance, ne mérite
pas des préceptes particuliers. A dire vray, nous nous préparons contre
les préparations de la mort. La Philofophie nous ordonne d'auoir
la mort toufiours deuant les yeux, de la preuoir&confiderer auant
le temps : & nous donne après, les règles &c les précautions, pour
prouuoir à ce que cette preuôyance & cette penfée ne nous bleffe.
Ainfi font les Médecins, quinous iettentauxmaladies,afin qu'ils
ayent où employer leurs drogues & leur art. Sinousn'auonsfceuviure,
c'eft iniuftice de nous apprendre à mourir, &c difformer la fin de
fon total. Si nous auons feeu viureconftamment &c tranquille-ment,
nous fçaurons mourir de mefme. Ils s'en vanteront tant qu'il leur
T o r t e i a v i e des p h i l o , plaira. Tota Philo fopherumvita commentatio mortkeft. Mais il m'eft ad-
f u p h e s d t v u e eftude 1
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d e la m o r t , iimc, uis que c eit bien le bout, non pourtant le but delà vie. Celtiann,
Mort findtUYte, f° n
extrémité, non pourtant fon obiect. Elle doit eftre elle-mefme
non l'MfonobjecJ. à foy,fa vifée,ion deffein. Son droit eftude eft fe régler,feconduire,fc
fouffrir. Au nôbre deplufieursautres offices, que compréd le gênerai
& principal chapitre de fçauoir viure, eft cet article de fçauoir mou-